jeudi 19 février 2009

Ramzi & Adam : Un dessin animé 100% Marocain diffusé sur Al Jazeera Children


L'un s'appelle Ramzy et l'autre Adam. Ils sont frères jumeaux, âgés de six ans et depuis deux ans, ils font le bonheur de milliers d'enfants au Moyen-Orient. Ces deux petits garçons sont les personnages principaux d'un dessin animé 100% made in Morocco qui est diffusé en arabe sur la chaîne Al Jazeera Children à chaque Ramadan.

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L'histoire raconte les aventures de Ramzi et Adam qui souhaitant faire un cadeau à leur maman, décident de jeûner pour la première fois. Tous les jours, les deux petits garçons racontent leurs péripéties amusantes pendant le mois sacré et enseignent en même temps et à chaque épisode une qualité ou une valeur morale aux jeunes téléspectateurs arabes.
Ce dessin animé devenu culte, est conçu de A à Z au Maroc. Les storyboards, les scénarios, la phase de production et de postproduction sont tous ficelés dans les studios de Sigma Toons de la société Sigma Technologie à Casablanca. La réalisatrice et scénariste de ce dessin animé est Eveline Fouché. Elle a,dans sa carrière, réalisé et écrit des scénarios des plusieurs grands dessins animés français comme les Mondes Engloutis, Titeuf ou encore d'autres plus classiques comme Les Malheurs de Sophie ou la Chèvre de Monsieur Seguin. Interview.

- Yabiladi : Pourquoi être venue au Maroc pour travailler ?
- Eveline Fouché : J'ai toujours travaillé dans le domaine du dessin animé et ce, depuis 1982. Mince, ça ne me rajeunit pas tout ça ! (rires)
Pourquoi le Maroc ? J'ai eu l'occasion de venir après de nombreux voyages touristiques à Casablanca pour réaliser quelques publicités TV et j'ai pu par ce biais, rencontrer un bon nombre d'artistes 2D et 3D qui m'ont prouvés, que même autodidactes, à l'époque pas ou peu d'écoles enseignaient dans le domaine, ils étaient capables de créer et d'animer leur créations. Il y a énormément d'artistes ici, des jeunes doués qui ne demandent qu'une chose, mettre leur don au service d'un des plus beau métier du monde "le dessin animé". Nous somme à deux pas de l'Europe, parlons la même langue et voulons la même chose : créer, faire et se faire plaisir.... et j'adore le Maroc et les Marocains !

- Comment est né le dessin animé Ramzy et Adam ?
- J'ai passé plusieurs mois de Ramadan au Maroc en ayant pour seule chaîne TV que 2M et RTM. J'ai trouvé anormal que rien ne soit diffusé pour les enfants. De ce fait, j'ai réfléchis sur le concept d'une série TV dessin animé qui pourrait être diffusée chaque jour de Ramadan et qui expliquerai, de manière drôle et sympathique, les valeurs du mois de Ramadan aux enfants...

- L'équipe de Sigma Toons et vous avez déjà réalisé deux saisons. Etes-vous en train d'en préparer une troisième ?
- Nous préparons effectivement une suite de Ramzi et Adam, mais nous allons suivre nos héros tout au long de l'année et leur donner la possibilité d'amuser notre public avec d'autres valeurs telles que les lignes de conduite à suivre tout au long de la vie d'enfant. Nous allons aussi en profiter pour passer du 3 minutes au 7 minutes par épisode.

- Pourquoi les chaînes marocaines n'ont pas été intéressés par ce projet alors que les programmes tv des enfants au Maroc sont souvent importés de l'étranger ?
- Alors là, bonne question ! En fait, la seule raison valable, je crois, est qu'à l'époque du concept, je ne connaissais pas encore Sigma Technologies, et je n'ai pu, seule, approcher les chaînes et être prise au sérieux. La deuxième raison, est que quand j'ai proposé à Sigma Technologies le concept, eux même étaient en étroite relation avec la chaîne Al Jazeera Childrens qui cherchait des concepts de série TV à produire et à diffuser. Sigma Technologies avait dans son équipe, un super créateur graphique, AbdelHamid Benali, mais n'avaient pas de concept littéraire. Je crois, pour conclure, que je suis arrivée au bon endroit et au bon moment...

- Ce dessin animé est donc destiné aux enfants des pays arabes, majoritairement musulmans. Respecter un aussi large public doit-être assez difficile. Quelles sont les choses que vous pouvez faire et celle que vous ne pouvez pas faire ?
- Les choses à faire pour que la série soit appréciée, sont d'expliquer les valeurs de Ramadan avec une petite histoire drôle et légère. Montrer toujours l'exemple aux enfants, rester constamment positif par exemple, ne pas dire "il ne faut pas être méchant", mais plutôt : "il faut être gentil". Et bien sûr, étant scénariste des 30 premiers épisodes, j'ai du faire énormément de recherches sur le Mois de Ramadan et la religion pour ne pas faire faire à nos héros des actes totalement interdits pendant le Mois de Ramadan.

- Aljazeera children vous a-t-elle déjà refusé un épisode ou demandé de modifier une partie d'un épisode ?
- Bien sûr ! pour la deuxième saison surtout car la chaîne à souhaité que nous fassions faire les scénarios directement en langue arabe, pensant que nous aurions moins de soucis linguistique. Le problème est que nous avons du faire appel à plusieurs scénaristes et il a été difficile de faire une homogénéité d'écriture.

- Combien vous faut-il de temps pour faire un épisode ?
- Vu que c'est un travail en chaîne, les taches se superposent, mais nous avons produits 33 épisodes en 9 mois, du scénario à la livraison PAD des épisodes. Cela revient à à peu près, 1 semaine et deux jours par épisodes de 3 minutes.

- Combien êtes-vous dans l'équipe et surtout qui fait quoi ? Quelles sont les étapes les plus difficiles pour faire un tel dessin animé ?
- En comptant le staff dans sa totalité, environ une trentaine de personne ont travaillé sur la série. Nous avons mis en place toute l'organisation d'une vrai équipe de production, avec tous les postes nécessaire et des responsables à chaque unités. Le plus difficile pour faire une série, c'est de maintenir, à la fois la qualité tout au long de la production, maintenir le rythme, palier à tous les impondérables quotidiens (et il y en a !) afin de pouvoir tenir notre engagement de livraison pour la diffusion.
Un spécial "Ramadan" doit être diffusé les jours de Ramadan, et malheureusement, nous ne pouvons pas décaler la date ! Rien que pour cela, on peut dire que nous avions la "barre haute", pour une première production Marocaine...
Par Farida Larani - Source de l'article Yabiladi
Reportage sur 2M

vendredi 6 février 2009

La vision des Arabes dans une bande dessinée des années 1930


Une bande dessinée nous a été gentiment prêtée par un restaurateur de Forcalquier, qui l’a lui-même trouvée dans une brocante. 
Que nous révèle cette album sur la vision du monde arabe par un dessinateur de BD, connu, reconnu, lu et abondamment publié ?



Mais d’abord, qui est son auteur ?  
Robert Dansler est né en 1900 et mort en 1972. Il a publié régulièrement sous le pseudonyme de Dan Bob. Il se lance dans la BD dans l’entre deux guerres mais trouve son heure de gloire après la Deuxième Guerre mondiale où il devient un des plus prolifiques auteurs de BD. 
Il apprend le dessin et la sculpture à l'école Bernard-Palissy de Paris. Après la première guerre mondiale, il se tourne vers la peinture et la publicité. Au début des années 30, il se lance dans l’illustration et fait partager ses premiers gags (Tel Quelle Hérisson). Il devient artiste producteur de bandes dessinées et collabore à des magazines comme JeudiJean-Pierre et plusieurs almanachs. Après la Seconde Guerre mondiale, Dansler intensifie sa production. Il devient l'un des principaux artistes des éditions Artima où il restera jusqu'à sa mort en 1972. Il y crée des personnages comme Bill TornadeJack Sport et Tarou.


Que nous raconte cette bande dessinée ? 

Marius et Fil de fer sont deux pescadous marseillais qui échouent avec leur bateau (la girelle) sur les côtes barbaresques. Zone géographique floue s'il en est. Cette BD retrace les tribulations de deux pescadous dans le monde arabe. Suite à un excès de vitesse en âne ils échappent de peu à un horrible supplice… Heureusement l’armée française intervient…


Une population arriérée et violente

Les Arabes nous sont présentés comme agressifs. A peine le pied posé sur cette fameuse côte barbaresque qu’une horde armée attaque, sans raison, nos pêcheurs inoffensifs. Cette violence barbare se retrouve dans les principes et les pratiques de la justice du calife. Justice tyrannique et arbitraire dans son fonctionnement et barbare dans ses punitions (supplice du pal). Le cadi est dessiné sous les traits d’un homme perfide et manipulateur. 


Le vocabulaire est d’ailleurs révélateur de ce mépris : le terme "barbaresque" est utilisé à maintes reprises et revient comme un leit motiv. Or, ce terme est désuet à cette époque où l’on désigne clairement les lieux : Algérie, Maroc etc. Il y a donc sans doute la volonté d’assimiler Arabes et barbares. D’ailleurs ils sont qualifiés de sauvages par fil de fer et la ville du calife n’est autre que "Krouiahabad". On reconnaît bien dans ce néologisme un des mots insultants pour désigner les Arabes, "crouilles". 


Une population naïve, inculte et finalement inoffensive
Les Arabes ne sont finalement pas si méchants. Ils sont seulement naïfs. C’est en tous cas la vision qu’en donne l'auteur à la page 3 : « vous avez vu ? Il tue les lions avec son derrière ! ». 


Mais les Arabes ont beau être des sauvages ils n’en sont pas moins poltrons. Cette poltronnerie se retrouve à deux reprises. La fuite de la horde armée lorsque Marius tue un lion avec son derrière : « Par le prophète! Sauve qui peut! » et surtout la dernière scène. Cette scène nous montre des Arabes fuyant les troupes françaises. Leurs visages sont apeurés, terrifiés. Derrière, l’armée française est joyeuse, rigolarde, tellement sûre de sa force et de sa victoire que fusils et épée sont levés. D’ailleurs, ils ne tuent pas vraiment, on a l’impression qu’ils jouent avec les Arabes. Bref, un jeu d’enfant, comme semble le suggérer la dernière case : « En avant les enfants !». A moins que cette dernière ne suggère aussi le « Allons enfants de la patrie … ».


   


En définitive, une situation de sauvagerie qui justifie la colonisation comme "mission civilisatrice" (Jules Ferry). La colonisation souvent présentée comme une libération est ici présentée comme une double libération : libération de la sauvagerie mais aussi de nos deux héros marseillais.
Est-ce une vision raciste ? Peut-être, mais elle correspond certainement à ce que pensait la population de l’époque car on a vu que R. Dansler est un dessinateur connu qui a du succès. Et finalement en matière de cliché sur les civilisations différentes il n’a rien à envier à un auteur plus connu : Hergé.


Par Eric Gevia, Mathieu Anselmino, TigranYeghiazarian et Eddy élèves de 1ère ES 1- Lycée Saint-Charles Marseille - FRANCE

L'auteur publie des BD régulièrement inspirées par les horizons exotiques (résurgence de son passé d’officier dans la marine pendant Première Guerre mondiale ?) : Pomme et roudoudou dans la jungle en 1946 ; Dans les griffes du serpent vert en 1941 ; Le bal des serpents en 1942, ou encore par Marseille :Almanach Escartefigue en 1938. Il publie une petite bande dessinée bourrée de clichés sur les Arabes : Mohamed fil de fer et Ali boubou Marius. Nous n’avons trouvé aucune information sur cette BD, aucune référence. La date de publication n’est pas indiquée mais c’est probablement juste après 45 puisque c’est édité chez Artima. Peut être avons-nous mal cherché, peut être y a-t-il volonté de ne pas écorner un auteur connu.