jeudi 28 mars 2019

Le FICAM dévoile son palmarès 2019

Le FICAM dévoile son palmarès


Le FICAM 2019, c’est fini. Hier soir le Festival International du cinéma d’animation de Meknès a pris fin après 6 jours de projections, rencontres et ateliers. Une cérémonie de clôture durant laquelle a été primé le film “Le jour Extraordinaire”, court-métrage de Joanna Lurie dans la catégorie Courts-Compet’.

Une catégorie présidée par le réalisateur néerlandais, nommé en 2016 à l’Oscar du meilleur film d’animation pour “La tortue rouge”, et composé de l’actrice marocaine Samia Akariou et Marc du Pontavice, Président de Xilam Animation.

Dans ce court-métrage, “des villageois traversent des étendues d’eau aussi vastes que périlleuses, dans des coquilles de noix, pour accompagner leurs morts à destination … là où la mer et le ciel se rencontrent”, explique la jeune cinéaste sur son site.

La “Mention spéciale du jury” est revenue au film “Je sors acheter des Cigarettes” d’Osman Cerfon.

Le Prix du Public a lui été décerné à “Roughhouse” de Jonathan Hodgson.

Le court-métrage “My Little Goat” de Tomoki Misato a reçu le prix du Meilleur film étudiant. “Vermine” de Jérémie Becquer et “The Ostrich Politic” de Mohamad Houhou se sont quant à eux vus décerner le Prix Ex-aequo du Jury Junior.

Le Jury Junior du Longs-Compet’ a accordé de son côté le prix du Meilleur long-métrage à “Tito et les oiseaux” de Gustavo Steinberg.

Quant au prix du Public, il est revenu à Kitarô Kôsaka pour son film “Okko et les fantômes”.


Enfin, le court-métrage d’animation Jeune public “Prix Jeunesse TV5 Monde” a été décerné, par un jury composé d’élèves, à Nolwenn Roberts pour son film “Le rêve de Sam”.

Durant la cérémonie de clôture, les spectateurs ont également pu apprécier le court-métrage du lauréat 2018 du Grand Prix Aïcha, “Amour paternel” d’Abderrahman Kandili. Ce dernier faisait également partie des 6 jeunes accueillis à la résidence d’écriture du FICAM à Meknès.
30.000 visiteurs, 160 étudiants, 50 fictions

Cette année encore, de grands noms du cinéma d’animation international s’y sont donnés rendez-vous et sont allés à la rencontre du public mais aussi des nombreux étudiants présents cette année encore. Parmi eux, l’Américain Peter de Sève (L’âge de glace) ou encore les Français Michel Ocelot (Kirikou et la sorcière, Dilili à Paris...) et Didier Brunner (producteur d’Ernest et Celestine, Les triplettes de Belleville, Kirikou et la sorcière,...).

Le FICAM, c’est 30.000 visiteurs par an, dont 160 étudiants, 50 fictions projetées et 15 nationalités représentées. “On est très loin des 8 films présentés pour notre première édition”, avait déclaré la directrice de l’Institut de Français de Meknès, Lyliane Dos Santos, lors de la cérémonie d’ouverture.

Source de l'article Huffpostmaghreb

mardi 26 mars 2019

L'univers d’un jeu vidéo influence positivement la motivation dans l’apprentissage

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L'univers d’un jeu vidéo influence positivement la motivation dans l’apprentissage
Un jeu africain de faible qualité ludique est sérieusement efficace en ayant une forte composante socio-culturelle.

Il existe des jeux vidéo auxquels on joue sans voir le temps passer, alors que d'autres sont abandonnés sans regret après quelques minutes. Nos expériences antérieures de jeu affectent nos choix et pratiques ludiques postérieures. Ainsi un «hardcore gamer» est parfois plus exigeant et regardant sur la qualité ludique, l’univers, le gameplay ou la scénarisation d’un jeu.

Le souhait de tout joueur professionnel de jeu vidéo c’est d’atteindre le nirvana, cette zone de flow où l’équilibre challenge-compétence permet au joueur d’être transporté dans l’univers même du jeu avec lequel il ne fait qu’un. Cependant, plus on est un joueur expérimenté, plus il est difficile d’atteindre cet état de jouissance. Et lorsqu’on est un joueur occasionale (casual gamer) ou joueur ordinaire moins expérimenté, il est moins difficile d’atteindre sa zone de flow[1].


Le plus important, ce n'est pas la compétition (challenge) ou la compétence (skills), mais bien la relation entre les deux. C'est elle qui permet au joueur d'atteindre « la zone ». Si votre niveau est faible et que la compétition l'est aussi, ou si votre niveau est élevé et que la compétition l'est aussi, alors vous pouvez le faire.

À l'inverse, si vous êtes outsider, vous serez dépassé par l'ampleur de la tâche et, d'après Csikszentmihalyi, c'est du stress (anxiety) que vous ressentirez, pas le Flow. Et si votre adversaire est trop faible, vous tomberez dans l'ennui (boredom).
Je m'y reconnais

Une littérature scientifique abondante analyse les facteurs déterminant la motivation et affectant l’expérience de jeu d’un joueur : la théorie des usages[2] et gratifications[3], la théorie du flow[4] et la théorie de l’autodétermination[5]. En nous appuyant principalement sur la théorie du flow, nous avons mené une étude sur un jeu sérieux pour mobile dédié à l’apprentissage des modes de prévention et de traitement du paludisme : Hello Nurse.

Ce jeu a été intégré au parcours pédagogique des élèves infirmières et sages-femmes d’un établissement public à Accra au Ghana. Les résultats de l’étude menée avec un échantillon de 157 participants démontrent en effet que, des joueurs expérimentés peuvent atteindre un certain état de flow avec un jeu sérieux lorsque ce dernier contient une forte dimension identitaire ou culturelle. Autrement dit, l’Univers du jeu Hello Nurse, bien qu’ayant une faible qualité ludique[6], est facteur de motivation et influence très positivement l’expérience de jeu des joueurs.

L’univers est une composante du « décorum »[7] qui contient à la fois les productions graphiques et sonores de même que les éléments scénaristiques soutenant la motivation des apprenants-joueurs. Cette composante est prise en charge dans la conception par les concepteurs du jeu, bruiteurs, graphistes, scénaristes, etc., et constitue un levier supplémentaire pour articuler apprentissage et motivation.

L’univers de Hello Nurse fut noté principalement en fonction du soin accordé à la qualité graphique, du son et à la familiarité que les infirmières et sages-femmes peuvent y trouver en relation avec leur réalité quotidienne. Nous avons mesuré ce critère au travers de trois assertions sur lesquelles les participants ont exprimé leur degré de satisfaction.


Figure 1: Evaluation de l'Univers dans Hello Nurse

À la première affirmation, « Ce jeu, avec les personnages et le décor, était proche de ma réalité », 45% sont d’accord et 19% déclarent être ‘Tout à fait d’accord’ ; contre seulement 11% qui ne sont point d’accord. Elles ont beaucoup apprécié la qualité du graphisme et des scénarisations avec des dialogues avec un langage argotique : et l’univers graphique qui reflète un environnement culturel familier.

Par exemple, les éléments de rétroaction et interjections dans le jeu ont été réalisés en langue locale, le twi, et cela stimule les joueurs-apprenants. Dans le jeu, après une tentative infructueuse, le joueur se voit interpellé par l’expression : « Okro Mouth », qui signifie littéralement, « ta bouche glisse comme le gombo ».

Pour la majorité des participants, Hello Nurse était leur premier jeu mobile avec tous les personnages africains et des contenus pédagogiques aussi proche de leur réalité. De toutes les applications installées dans leur mobile, Hello Nurse est le seul où le personnage est Akan[8] et s’exprime avec des expressions locales.


Figure 2: Scène de dialogue entre l’héroïne Adwoa et les membres de la communauté.

Les concepteurs de Hello Nurse, Leti Arts, tout comme ceux d’Aurion : Kiroo Games, « reprennent dans leur jeu les éléments culturels comme : l’histoire, les rythmes musicaux, le style thématiques abordées travers les thématiques abordées, ils mettent en scène certaines réalités culturelles africaines»[9]. .

"Nous utilisons le jeu comme un moteur pour partager les expériences africaines entre nous et avec le reste du monde à travers des récits, des sons et des personnages africains »[10], a déclaré Hugo Obi, co-fondateur de Maliyo Games au Nigeria. « Le succès des jeux africains viendra par la culture. Une des choses qui rend les jeux africains intéressants, c’est que, contrairement aux jeux occidentaux simplement situés en Afrique qui ont tendance à exploiter des contextes de guerre, les jeux africains s’inspirent du folklore africain, des contes, des légendes » souligne Jeanbart, un acteur de l’industrie du jeu vidéo africain.


Figure 3: Evaluation du plaisir à jouer Hello Nurse

Pour évaluer le plaisir des participants dans le jeu, nous leur avons soumis trois assertions afin de recueillir leur avis. Les résultats, comme on peut le lire sur figure, montre qu’ils sont majoritairement très satisfaits de la qualité[11] ludique : seuls quelques-uns ( 3%) n’ont pas trouvé le jeu amusant et estiment que le plaisir ludique n’était pas au rendez-vous (6%).

Cependant, en partant du principe sus-évoqué et selon lequel les pratiques ludiques antérieures influencent l’expérience du joueur, nous avons demandé à chaque étudiant d’évaluer sa pratique des jeux vidéo, en indiquant la fréquence.


Figure 4 : Evaluation des pratiques de jeux vidéo sur mobile

Il apparaît que la moitié des participants jouent en moyenne deux heures par jour et principalement sur leur smartphone, très répandu (et abordable, à partir de 50$). Leur « indulgence » sur la qualité ludique du jeu contraste avec notre expérimentation personnelle. Nous avions constaté que les contenus informatifs primaient sur le ludique. Notre pratique des jeux de même que les savoirs mobilisés ont nettement influencé cette évaluation de la qualité ludique : plus on est joueur, plus on est critique. Or une étude expérimentale de Michel[12] avait démontré que les joueurs ayant une faible expérience des jeux vidéo étaient plus faciles à contenter dans la notion de jeu que des joueurs réguliers. Ils sont alors satisfaits de graphismes minimaux, de mécaniques simples ou du peu de difficulté.

En définitive, l’univers d’un jeu vidéo affecte l’expérience ludique du joueur. Et les jeux sérieux produits en intégrant la réalité culturelle du joueur passent facilement la pilule éducative (ou sérieuse) lorsqu’ils intègrent véritablement des personnages et un environnement culturel similaire à celui du joueur.

Cependant la qualité ludique de ces jeux «made in Africa» doit être améliorée afin que ces jeux se déghettoïsent pour s’adresser au monde. Les développeurs de jeu vidéo africains doivent donc davantage peaufiner leur jeu afin de les rendre compétitifs selon les standards internationaux.

Et cela ne peut être possible que si les acteurs des ministères de la culture, des sciences et technologies investissent et soutiennent[13] davantage l’industrie émergente du jeu vidéo africain, dont le potentiel économique n’est plus à démontrer. Et au-delà de l’économique, le jeu vidéo peut constituer un facteur essentiel d'influence culturelle et économique.[14].

Par Christian Élongué - Source de l'articel Cursusedu

Notes et référence

[1] Linda Hamdi-Kidar et Laurent Maubisson, « Les chemins d’accès à l’expérience de flow : le cas des jeux vidéo », Management Avenir N° 58, no 8 (2012): 120‑43.
[2] Katz, E., Blumler, J.G., & Gurevitch, M. (1973). Uses and gratifications research. The Public Opinion Quarterly, 37, 509-523.
[3] Rosengren, K.E. (1974). Uses and gratifications : a paradigm outlined. In J.G. Blumler, E. Katz, (Eds.), The uses of mass communications : current perspectives of gratification research (pp. 269-286). Beverly Hills, CA : Sage Publications.
[4] Csikszentmihalyi, M. (1990). Flow : The psychology of optimal experience. New York : Harper and Row.
[5] Deci, E.L., & Ryan, R.M. (1985). Intrinsic motivation and self-determination in human behaviour. New York : Plenum Press.
[6] Lavigne, M. (2014). Les faiblesses ludiques et pédagogiques des serious games. In Actes du Colloque international TICEMED (Vol. 9).
[7] Marne, B., Huynh-Kim-Bang, B., & Labat, J.-M. (2011). Articuler motivation et apprentissage grâce aux facettes du jeu sérieux. In EIAH 2011-Conférence sur les Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain (p. 69–80). Editions de l’UMONS, 2011.
[8] Groupe ethnique dominant à Accra au Ghana.
[9] Johnson, Promise Mappè. (2018). Enfants africains et loisirs à l’heure de l’économie numérique. Etat de lieux et perspectives de l’industrialisation des jeux vidéo au Cameroun. Université de Dschang.
[10] Christian Elongué, « L’industrie du jeu vidéo en Afrique tiraillé entre localité et globalité. », Thot Cursus, octobre 2018, https://cursus.edu/articles/41573/lindustrie-du-jeu-video-en-afrique-tiraille-entre-localite-et-globalite
[11] Il ne semble pas y avoir de critères communs pour dire ce qu'est un bon jeu vidéo. Certains joueurs sont plus contemplatifs et vont analyser beaucoup l'aspect visuel alors que d'autres plus actifs sont scruter les mécaniques mises en place, le type de défi, etc. Des titres se vendent sur l'aspect technique poussé alors que d'autres vont se vendre sur les façons de jouer. Du coup, à quelques exceptions près, rares sont les jeux qui plairont à tous. La génération du numérique n'est pas aussi homogène que certains pouvaient le croire.
[12] Michel Lavigne, « Jeu et non jeu dans les serious games », Sciences du jeu, no 5 (20 février 2016), https://journals.openedition.org/sdj/648
[13] Christian Elongué, « L’industrie africaine du jeu vidéo : de la croissance à la reconnaissance. », Thot Cursus, Novembre 2018,
[14] « Jeu vidéo : le futur du soft power ? », France Culture, 29 février 2012,



FICAM 2019: Des couvertures du "New Yorker" à "L'Âge de glace", le dessinateur Peter de Sève se confie

Le dessinateur Peter de Sève montre un dessin du personnage de Sid, dans
Le dessinateur Peter de Sève montre un dessin du personnage de Sid, dans "L'Âge de glace".


Il est un des invités d’honneur de l’édition 2019 du Festival international de cinéma d’animation de Meknès (FICAM). Peter de Sève a travaillé avec les plus grands studios d’animation comme Pixar, Disney et Blue Sky, et a dessiné certains des personnages les plus connus de l’animation, dont ceux de la saga “L’Âge de glace”, notamment Scratch l’écureuil préhistorique -même s’il avoue préférer Sid. 

Depuis les années 90, Peter de Sève est aussi un des dessinateurs de la célèbre revue américaine The New Yorker. Certaines de ses couvertures ont d’ailleurs été exposées dans le hall de l’Institut français de Meknès, aux côtés des dessins réalisés pour “L’Âge de glace”.

Une carrière de plus de 30 ans qu’il a résumée au cours d’une masterclasspendant le festival, dans laquelle il a parlé de ses influences, son travail, mais aussi de certains des dessins réalisés pour des studios d’animation, comme pour “Le Bossu de Notre Dame”. “Ils n’ont pas utilisé beaucoup de mes idées, mais c’était très amusant de travailler dessus”, confie le dessinateur américain au HuffPost Maroc. A l’occasion de son passage à Meknès, nous avons rencontré cette figure indépendante de l’animation et du dessin de presse aux États-Unis.

HuffPost Maroc: Comment avez vous entendu parler du Festival international de cinéma d’animation de Meknès?

Peter de Sève: Par mon ami Carlos Saldanha (réalisateur de “L’Âge de Glace”, ndlr), qui est venu l’année dernière au festival avec sa famille et m’en a dit le plus grand bien. Il a parlé de moi à Mohamed Beyoud (le directeur artistique du festival, ndlr), qui m’a invité à venir cette année.

Vous avez travaillé avec beaucoup de grands studios. N’avez-vous jamais signé avec un seul?

Non, mais j’ai toujours été surpris que l’on ne m’ait jamais demandé l’exclusivité. Je suis surpris que Blue Sky (la société de production de “L’Âge de Glace”, ndlr) par exemple ne m’ait jamais demandé de ne travailler pour personne d’autre, ce qui est génial car cela m’a donné l’occasion de travailler sur plusieurs choses différentes et d’être indépendant. En tant qu’indépendant, je suis bien traité car je suis toujours un invité, ce qui n’aurait pas été le cas si j’avais signé avec un seul studio. J’aime être un invité, je me sens gâté.

Être indépendant est plutôt un luxe dans cette industrie…

Je n’oublie jamais que j’ai beaucoup de chance de pouvoir être un indépendant. Ce n’est pas toujours facile, car je ne sais jamais quand et d’où viendra mon prochain boulot. Mais je le fais depuis plus de 30 ans et je me suis débrouillé jusqu’à maintenant, mais je ne dirai pas que c’est facile tous les jours.

Vous êtes illustrateur, créateur de personnages, dessinateur... Pourquoi multiplier ainsi les casquettes?

La variété garde le travail intéressant. Je pense que si je ne me concentrais que sur une chose, le travail deviendrait vite ennuyeux et frustrant. Ce qui est bien quand on est freelance, c’est qu’à chaque fois que le téléphone sonne, il y a toujours la possibilité d’une nouvelle aventure, ce qui est très excitant.

Ces dernières années, les dessinateurs sont de plus en plus encouragés à respecter les sensibilités de certaines communautés. Comment votre travail a évolué dans ce contexte?

Mon travail est plutôt inoffensif, mais je dois être de plus en plus conscient de cela, et il est nécessaire de représenter différentes ethnicités quand je peux, ce qui n’a pas toujours été évident pour moi, un homme blanc issu d’un quartier majoritairement blanc. C’est ce que j’ai connu dans mon enfance. Je cherche aussi à représenter plus de femmes, il y a une sensibilité autour de ce sujet aux Etats-Unis, mais il y a une bonne raison pour cela, et je suis heureux de le faire.

Exposition Peter de Sève dans le hall de l'Institut français de Meknès

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Dans les couvertures exposées par le FICAM, on remarque qu’un des sujets dont vous aimez bien vous moquer est la figure du hipster américain. Pourquoi en avoir fais une de vos cibles préférées?

Ils sont assez irrésistibles, et ils sont drôles et faciles à caricaturer. Ce n’est pas que je les cible particulièrement, mais il est sûr qu’ils se prêtent à l’illustration.


Dans ce contexte actuel aux Etats-Unis, sous l’ère Trump, est-ce facile de le caricaturer?

J’y pense souvent. J’ai réalisé un seul dessin que j’aime bien de Donald Trump, celui où l’on voit l”Oncle Sam avec un alien qui sort de sa poitrine (en référence au film “Alien”, ndlr) et c’est Trump. Cela a été difficile pour moi de penser à de bonnes idées sur lui, car je suis tellement en colère et dégoûté par lui que je ne le trouve pas amusant et je ne saisis rien sur la satire autour de lui. Je ne trouve pas cette situation drôle mais tragique. Il est lui même tellement une caricature. Vous ne pouvez pas caricaturer une caricature. Vous ne pourrez jamais être assez obscène et absurde pour illustrer à quel point il l’est dans la vraie vie.

Par Salma Kouja - Source de l'article Huffpostmaghreb

lundi 25 mars 2019

Olivier Madiba (Kiro'o Games): «Créer des jeux qui règlent des vrais problèmes»

Olivier Madiba (Kiro'o Games): «Créer des jeux qui règlent des vrais problèmes»


La Game Developers Conference, le plus gros rassemblement de professionnels du jeu vidéo au monde, se déroulait du 18 au 22 mars à San Francisco. 

Selon des études menées par des cabinets de conseil internationaux, l'Afrique ne représente actuellement que 1% du marché mondial du jeu vidéo. Mais le continent représente aussi un fort potentiel pour les acteurs du secteur, puisque plus de la moitié de sa population a moins de 35 ans. Qui aime les jeux vidéo en Afrique ? Où joue-t-on le plus et comment ? Pour en parler, Olivier Madiba, fondateur de Kiro'o Games - le premier studio de jeux vidéo au Cameroun - répond aux questions de Magali Lagrange.

Magali Lagrange : qui sont les joueurs de jeux vidéo sur le continent africain ? Quel âge ont-ils ?

Olivier Madiba : les joueurs de jeux vidéo sur le continent, il y a des enfants qui jouent sur le smartphone de leurs parents, surtout des préados, on a les ados, qui jouent beaucoup à des jeux console, mais ils sont plus limité en quantité. Et on a les jeunes adultes, entre 18 et 35 ans qui jouent sur leurs smartphones.

Est-ce qu’on trouve ces joueurs toutes classes sociales confondues ou est-ce que, comme jouer aux jeux vidéo ça a aussi un coût, c’est plus restreint ?

C’est plus restreint parce qu’il faut être dans des capitales. La plupart du temps, c’est vraiment la population urbaine qui est moyenne – pas au sens occidental, mais au sens africain. Donc, vous avez par exemple des familles de taximan, qui ne représentent peut-être pas le niveau de vie moyen d’un Occidental, mais qui, ici, représente notre vraie classe moyenne. Ce sont des gens qui ont un revenu journalier de 5 000 à 15 000 FCFA. Dans leur entourage il y a des smartphones, du coup.

Sur quel support on joue généralement ? Des smartphones ?

Oui, c’est vraiment les smartphones. Les consoles ont vraiment des coûts trop élevés pour la plupart des ménages africains. Aujourd’hui, une PlayStation 4, c’est dans les 180 000 FCFA, c’est presque un mois entier de loyer d’un fonctionnaire camerounais. (Rires) Donc vous imaginez, un mois entier sur une console, ce n’est pas évident. Et puis, souvent, les consoles ont des types de jeu qui sont plus destinés à des core gamer, ça demande d’avoir du passif, de l’expérience, là où les jeux smartphone sont souvent plus grand public et moins exigeants en termes de culture de jeu.

Qu’est-ce que c’est un core gamer ?

Un core gamer c’est un peu moi, c’est celui qui joue à Street Fighter, à Final Fantasy, à Metal Gear. Donc celui, on va dire, qui est déjà à l’heure de ce qui se fait partout dans le domaine. Le casual gamer c’est plus celui qui va se dire « je suis dans une file d’attente, j’ai Candy Crush dans mon smartphone, je joue pendant 15 minutes et ça va ».

Mais alors, justement, pour jouer sur smartphone, il faut internet ?

Oui, mais en général juste pour télécharger les jeux. Les Africains choisissent beaucoup les jeux qui ne demandent pas de connexion permanente. Mais c’est vrai que ça dépend des villes, parce que, par exemple, au Cameroun, à Yaoundé et Douala, les télécoms ont mis ce qu’il faut pour de la connexion plus ou moins permanente. Ça dépend des villes de chaque pays.

Dans quel pays du continent on trouverait le plus de joueurs ? Où sont les plus grosses communautés de joueurs en Afrique ?

Nigéria, Afrique du Sud, Kenya, je pense. Les pays anglo-saxons avaient déjà pris beaucoup d’avance dans leurs infrastructures télécom et sont en général plus ouverts économiquement à ce genre de concept.

Le géant du web, Google, a présenté sa future plateforme de jeux vidéo en streaming, cette semaine, est-ce que c’est par là que peut passer, selon vous, l’avenir du jeu vidéo en Afrique ?

Il y a un énorme potentiel. Parce que, en effet, tout le monde pourra jouer à des jeux de très bonne qualité sans avoir le matériel qu’il faut. Par contre, le gros défi, ça va être le retard d’infrastructures. Parce que là Google se le permet parce que vous aurez la 5G en Occident d’ici 2021 environ. Alors que nous, si je ne veux pas être trop pessimiste, ce sera du côté de 2030 qu’on aura fait le saut effectif pour de la 5G palpable. Ça peut arriver plus vite, mais pas avant 2025. Il y a tout de même un gros potentiel, c’est clair.

Donc l’avenir du jeu vidéo en Afrique, l’avenir à moyen terme c’est quoi ? Plus de jeux sur smartphone encore ?

Déjà, je vais donner un truc : si vous faites des jeux vidéo en Afrique, il faut complètement changer de paradigme. L’image que j’aime souvent donner, c’est que les jeux vidéo comme Zelda ont marché en Europe parce qu’ils capitalisaient sur une culture du cinéma et du livre qui avait beaucoup installé l’univers de la cape et de l’épée – par exemple – dans l’imaginaire des enfants. En Afrique, ce que nous avons observé, c’est que souvent les gens ont tellement de problèmes que le fait d’aller tuer des dragons n’est pas forcément très alléchant dans leur esprit. Par contre, prenez une tout autre piste : essayez d’imaginer créer des jeux qui règlent de vrais problèmes, ou du moins qui expliquent comment régler de vrais problèmes, là vous tenez une formule. C’est ce que Kiro’o est en train de faire.

Mais ça, c’est très lié au quotidien des gens. Est-ce que les joueurs de jeux vidéo, en Afrique comme ailleurs, n’ont pas envie de s’évader quand ils jouent ?

Ah non ! Y a un truc qui est phénoménal chez nous, c’est qu’on adore, au contraire, le fait de pouvoir simuler notre réalité, mais en nous donnant une réécriture et un pouvoir là-dessus. On est très sous pression dans notre environnement. Donc si vous faites un jeu où vous me donnez le moyen de contrôler l’environnement dans lequel je vis, en fait c’est plutôt ce que moi je veux le plus vivre. L’évasion, ça vient chez les enfants, par contre.

Par Magali Lagrange - Source de l'article RFI 

dimanche 24 mars 2019

FICAM 2019: "Another day of life", quand le documentaire se met au service de l'animation

FICAM 2019:

Ce samedi 23 mars, le Festival international de cinéma d’animation de Meknès (FICAM) présentait “Another day of life” (à ne pas confondre avec “Another day of sun” de la B.O de “La La land”), des réalisateurs polonais Damien Nenow et espagnol Raul de la Fuente. 

Le long métrage, qui mêle animation et séquences documentaires, est une adaptation du livre de Ryszard Kapuscinski, d’“Une guerre à l’autre”, dans lequel ce dernier raconte le début de la guerre d’indépendance en Angola.

La trame se déroule en 1975, à la veille de la déclaration d’indépendance de cette dernière colonie d’Afrique. Alors que les colons portugais quittent à la hâte le pays, les prémices de la guerre civile apparaissent. Une guerre qui durera de 1975 à 2002 et fera plus de 500.000 morts.


Dans ce conflit, deux factions s’opposent: le MPLA socialiste, soutenu par Cuba, et les UNITA, “capitalistes” soutenus par l’Afrique du Sud et les Etats-Unis.

C’est dans ce chaos, surnommé “confusao” par les locaux, que l’on rencontre le personnage principal du film, Ryszard Kapuscinski, alias Ricardo, correspondant polonais en Angola.

Ce dernier tente désespérément d’atteindre le sud du pays pour interviewer une figure du MPLA, un Portugais ayant changé de camp, choisissant de combattre avec les Angolais contre les colons.

Commence alors un périple de tous les dangers pour Ricardo et ses camarades. Un récit ponctué par des séquences documentaires, faisant témoigner des personnages du film d’animation, dans l’Angola ou le Portugal contemporain. 

La fascination, voire l’obsession de Ricardo pour la guerre le pousse à risquer sa vie et celle des autres pour s’approcher le plus possible du front.

“Another day of life”, au delà de faire découvrir un pan peu connu de la guerre froide, interroge également sur la place du journaliste et son intégrité, dans un terrain de guerre où sa simple présence peut changer le cours des évènements.

En effet, si Ricardo reste moins engagé dans le conflit que son ami Arthur, qui se décrit lui-même comme un journaliste et militant du MPLA, il n’y a pas de doute sur le côté vers lequel sa sympathie penche, même si ce dernier évoque rapidement les exactions commises par les deux factions. 

Un film qui ne cache pas son admiration pour son protagoniste, au point de ne pas assez s’interroger sur le bienfait de ses actions.

Présenté hors compétition, “Another day of life″ est le fruit du travail d’une équipe internationale composée de plus de 200 graphistes et animateurs, explique le FICAM.

Par Salma Kouja - Source de l'article Huffpostmaghreb

jeudi 21 mars 2019

Ethiopia’s First Female Superhero Comic ‘Hawi’ is Here

The comic book digs deep through the trenches of history and is inspired by Ethiopian Queen Yodit Gudit.

Résultat de recherche d'images pour "Hawi centers a female superhero,"Barely a year since the founder of Etan Comics, Beserat Debebe, brought us the first ever Ethiopian superhero comic, Jember, he's back with yet another first. This time, his newest comic book Hawi centers a female superhero, a young Ethiopian woman named Ement Legesse, who is tasked with having to rescue her mother after she's abducted. The colorful visuals are stunning and showcase Debebe's talented team of African artists and their unique ability to capture the vibrancy of Ethiopia. A story about returning to one's roots and having the courage to rise above the challenges that come with seeking reconciliation and belonging, it's one we can all relate to whether literally or figuratively.

"The fact that Hawi is Ethiopian means a lot to me," Debebe tells OkayAfrica. For the 29-year-old creator of Etan Comics, having an Ethiopian superhero is meant to normalize the idea that Ethiopians and Africans in general can have an impact on the world. "I wish I had seen an Ethiopian superhero growing up," he says. "I would have embraced my ability to make a difference earlier and acted on it."

Courtesy of Etan Comics

Hawi follows the story of Ement Legesse, a young Ethiopian woman living in America with her mother. In the opening scenes of the comic book, it becomes apparent that Ement desperately wants to visit Ethiopia on a guided tour but her mother is against the idea. According to her, Ement can barely speak their native Ahmaric language and fears for her safety given that numerous young girls have been abducted in Ethiopia. It's quite clear that Ement is frustrated by her mother's refusal to allow her to visit her home country. As the story progresses, the two eventually visit Ethiopia together (yay!) only for Ement's mother, however, to be abducted (oh no!). This is where the story really begins. Now we won't tell you how Ement obtains her dope superhero abilities but what we can tell you is what inspires them.

Courtesy of Etan Comics

Debebe feels that people are their own barriers to progress and that their perceptions of themselves are a result of they and see and subsequently internalize. "Most of the time, the way we think about ourselves is the main barrier to our own progress," he says.

His biggest hope is that all of his superhero characters take away these barriers and allow boundless imagination among African youth. "And have as much fun as possible doing it!" he adds.

While Hawi focuses on how a young woman discovers and comes into her own power, there is another powerful and feminine figure: Ethiopia's Queen Yodit Gudit. Queen Yodit, who was alive circa 10th century AD, earned the nickname "Esato" which is Ahmaric for "fire" among her Ethiopian people. Not only did it speak to her fiery spirit but more so her reputation for burning down architectural landmarks as well as churches following her great conquests. As centuries have gone by, the motives behind a number of things she did have been eroded by time and become lost along the way. However, they may very well become reborn in Ement.

Courtesy of Etan Comics

Hawi is a beautiful interweaving of the past and the present. It is a historical fantasy that is set in modern-day Ethiopia and draws from the mysteries of the kingdoms and queendoms of Ethiopia's rich past. This seems to be a signature style for Debebe who, in his first comic Jember, explored the ancient East African civilization known as the Kingdom of Punt.

Hawi is almost complete although Debebe has set up a kickstarter to ensure that the remaining costs of production are covered. The comic book will be available in both Ahmaric and English translations.

By RUFARO SAMANGA - Source of article Okayafrica

vendredi 8 mars 2019

Au Cameroun, Kiro'o Games veut lever jusqu'à 1 million $ pour passer à sa prochaine phase de progression

Au Cameroun, Kiro'o Games veut lever jusqu'à 1 million $ pour passer à sa prochaine phase de progression

Kiro'o Games, une entreprise fondée par le jeune promoteur camerounais Olivier Guillaume Madiba et qui est spécialisé dans le développement du jeu mobile, serait en train de préparer une nouvelle levée de fonds de 1 million $, avec un premier closing espéré à 300 000 $, a-t-on appris d’une source proche du processus.

« Les détails sur l'opération ne sont pas encore disponibles, mais effectivement l’opération est confirmée et sera lancé dans un bref délai, et une campagne à cet effet a même déjà débuté avec certains investisseurs et porte des fruits », a confié à l'Agence Ecofin, un des responsables de l'entreprise qui est basée dans la capitale camerounaise de Yaoundé.

Cette nouvelle levée de fonds, après les 250 000 $ mobilisés pour le lancement, servira à positionner l'entreprise et son projet dans sa prochaine phase de développement. L'opération prendra la forme, non plus d'un crowdfunding, mais plutôt d'une ouverture de capital. Une option qui permettra à des investisseurs en quête d'opportunités de croissance rapide et de sorties rentables de pouvoir se positionner.

« Nous avons une large vision de notre projet, qui n'est pas seulement celui de créer un jeu vidéo qui rappellerait des histoires et anecdotes africaines. Il est clair que nous préférerions voir des gens se divertir avec nos produits plutôt que ceux des autres. Mais au delà, nous voulons créer un écosystème et le studio de production n'est qu'un point de départ », a confié Madiba Olivier, il y a un an, lors d'une discussion publique avec des jeunes, sur l'auto-développement.

Kiro'o Games fait partie des faces visibles de entrepreneuriat camerounais dans le domaine de l'innovation technologique. Partie d'une idée d'étudiant qui n'en pouvait plus de se divertir avec les jeux des autres, son promoteur ambitionne désormais de suivre le business model qui a soutenu des groupes aujourd'hui devenus des géants, comme Amazon ou Facebook.

L'ambition affichée est de construire avec le plus grand nombre et offrir des opportunités de plus-values intéressantes au bout de quelques années. L'entreprise a indiqué, dans un rapport à ses investisseurs et dont Ecofin a eu copie, que son premier jeu, "Aurion", avait reçu un retour favorable de la communauté des joueurs, avec un volume cumulé de 100 000 téléchargements.

Par Idriss Linge - Source de l'article Agenceecofin

lundi 4 mars 2019

La face cachée de l’Afrique : une industrie des jeux vidéo en pleine émergence

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Alors que le marché des jeux vidéo a généré près de 120 milliards de dollars en 2017, on estime qu’il pourrait atteindre jusqu’à 235 milliards d’ici 2022

Toujours est-il que pour l’instant, l’Afrique ne représente que 1% de cette industrie. Les choses pourraient néanmoins bientôt changer puisque le marché des jeux vidéo se dynamise petit à petit sur le continent africain.
Les jeux mobiles : un accès plus facile

Comme les consoles et les ordinateurs sont encore beaucoup trop cher pour la majorité des Africains, ces derniers se tournent le plus souvent vers les jeux mobiles. En effet, de nombreux développeurs conçoivent désormais des applications qui peuvent être utilisées sur portable pour répondre à la demande croissante des consommateurs africains. Cette tendance est notamment très présente dans la niche des casinos en ligne. Pour se faire connaître, ces sites web offrent des promotions à leurs nouveaux utilisateurs. À titre d’exemple, le Casino LeoVegas accorde des tours gratuits à ces clients, et ce, sans qu’ils aient besoin de faire un dépôt initial. Notons qu’il existe des plateformes spécialisées qui permettent de faire une comparaison facile entre les différents casinos en ligne pour trouver les meilleurs bonus. Par conséquent, il est préférable d’effectuer des recherches exhaustives avant de choisir un casino en ligne.


L’émergence de jeux locaux

À l’heure actuelle, de nombreuses sociétés de production de jeux vidéo émergent aux quatre coins de l’Afrique. Certains d’entre eux ont connu un succès international grâce à leurs créations. C’est le cas de l’entreprise camerounaise Kiro’o qui a connu un grand succès avec le jeu d’aventure Aurion. Bien que leurs moyens restent limités, il y aurait tout de même près de 300 studios dispersés sur le continent. Des entreprises ont même fait leur apparition en Centrafrique et à Madagascar. Selon Sidick Bakayoko, créateur de la société ivoirienne Paradise Game, les concepteurs de jeux vidéo doivent mettre l’accent sur la richesse culturelle de leurs pays afin de se démarquer de leurs concurrents américains et asiatiques. Ce constat est d’ailleurs corroboré par les propos de l’analyste Thierry Barbaut. « Si on veut développer un jeu, en étant Ubisoft par exemple, sans connaître la culture africaine, c’est quasiment impossible », a-t-il déjà déclaré dans une entrevue accordée au média Sputnik.


Des rassemblements pour attirer les foules

Source : Compte @ParadiseGame.net sur Facebook

Plusieurs événements visant à faire la promotion des jeux vidéo sont désormais organisés en Afrique, comme en témoigne la tenue de la deuxième édition du Festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Abidjan (FEJA) ayant eu lieu du 23 au 25 novembre dernier. En plus de permettre à des jeunes de participer à un tournoi de jeux vidéo, ce festival avait comme objectif d’expliquer aux intéressés comment cette industrie fonctionne. En organisant l’événement, l’entreprise Paradise Game voulait éduquer la population sur les métiers auxquels toute personne ambitieuse peut aspirer.

En somme, l’Afrique est un terreau fertile pour les développeurs de jeux vidéo qui sont à la recherche d’un grand potentiel de croissance. Alors que l’industrie est à ce jour principalement dominée par l’Égypte, l’Afrique du Sud, le Maroc, le Nigéria et l’Algérie, d’autres pays comme le Cameroun commencent à s’imposer comme des acteurs de premier plan.

Par Francky - Source de l'article AfrikMag

samedi 2 mars 2019

Ghana - Eyram Tawia : « Être les pionniers dans l'industrie du jeu vidéo »

Apres son retour de la Finlande au Ghana, Eyram a effectue de nombreuses recherches pour determiner a quoi devrait ressembler le jeu sur le continent. Ses deux produits phares : Africa's Legends et Reawakening.

Le cofondateur du studio ghanéo-kényan Leti Arts croit au potentiel gigantesque mais encore inexploité d'un jeu vidéo continental.

Au Ghana, Leti Arts développe actuellement un jeu de super-héros inspiré des légendes et la culture de chaque pays africain. Les missions que doivent relever les joueurs dans leur quête font écho à l'actualité chaude du continent. Africa's Legends Reawakening, qui devrait sortir d'ici à la fin de l'année, s'ancre dans une réalité qui correspond aux attentes de toute une génération. 
C'est du moins le pari que font les développeurs, qui ont dû s'adapter au manque d'infrastructures locales. Pour Eyram Tawia, ils sont aux débuts d'une industrie prometteuse.

Le Point Afrique : Le succès du film Black Panther sur le continent a confirmé l'intérêt du public à suivre les aventures de super-héros africains. Africa's Legends Reawakeningentend-il surfer sur la même vague ?

Eyram Tawia : Le succès de Black Panther ne fait que confirmer ce qu'on sait déjà. Il y a de très grandes ressources dans chaque pays, du Mali au Nigeria ou la Somalie, mais qui n'ont jamais vraiment été exploitées. Africa's Legends Reawakening met en scène des héros inspirés de la mythologie et du folklore africain. Ça nous a demandé un grand travail de recherches historiques en amont pour que le design soit parfaitement cohérent. Par exemple, la cheffe des héros, Tolo, vient du peuple dogon du Mali. Elle est représentée avec le symbole kanaga, mais son masque a été modernisé... Vous avez le héros masaï, l'homme-araignée de l'ethnie ashanti du Ghana, mais aussi le couple de sapeurs du Congo... Le joueur va donc choisir l'un de ces héros, qui peut correspondre à son pays d'origine. Au fil des missions, il va rencontrer les autres personnages. Cette collaboration, que l'on veut sous le signe de l'unité africaine, va les mener dans une quête commune. Si vous jouez avec Ananse, vous commencez au Ghana. Puis, au chapitre 2, vous êtes envoyé au Nigeria, et ainsi de suite jusqu'à ce vous ayez rencontré toutes les « legends ». On veut en quelque sort s'inspirer du monde de Marvel avec les Avengers : les héros vont s'étoffer et s'associer.

Tolo Sagala est un personnage central de l'histoire du peuple Dogon au Mali. Sur le plan scientifique les Dogon ont par exemple découvert l'étoile de Sirus B avant les Français en 1930. © DR

Dans ce jeu de rôle, chaque joueur, avec son avatar de héros, devra relever des missions ponctuelles. Pourquoi avoir choisi des défis réalistes ?

Les héros viennent d'un univers imaginaire, mais les méchants peuvent être un président corrompu, un rebelle, un braconnier, un leader religieux extrémiste... Autant de figures qui sont malheureusement communes sur le continent. Les héros doivent s'associer pour empêcher leurs ennemis de mettre en œuvre leur plan maléfique. En parallèle, vous avez en effet des missions. 
Vous pouvez être à la recherche d'une épée magique au Mali, puis, soudain, vous êtes appelé pour empêcher une explosion en Afrique du Sud. D'un point de vue purement ludique, cela permet de maintenir une dynamique dans le jeu. Pour imaginer ces missions, on s'inspire tout simplement de problématiques concrètes. On pourra par la suite les actualiser en temps réel en fonction de l'actualité. Pour lancer le jeu vidéo en Afrique, on ne peut pas juste faire du Candy Crush ou du Angry Birds. Notre but, c'est de faire de Reawakening, une sorte de journal ou de média éducatif en format jeu vidéo.

Eyram Tawia, PDG et fondateur de Leti Arts. © DR
Vous défendez le potentiel du jeu vidéo en Afrique. Mais dans quelle mesure l'accès disparate aux technologies ou la qualité aléatoire des réseaux peuvent-ils être des freins au développement de cette industrie ? 

La culture du gaming est encore balbutiante en Afrique, bien sûr, mais nous voulons être les pionniers d'une industrie réellement nouvelle. Chaque produit que nous allons proposer doit servir à faire connaître le jeu vidéo. Nous avons déjà sorti un premier jeu, Africa's Legends, qui servait de test pour visualiser quel type de jeu pouvait séduire. Mais on a réalisé que ce jeu ne pouvait pas être compétitif car nous avions trop voulu imiter les jeux existants, venus d'Occident. Il faut bien se rendre compte que nous devons relever des défis dans cet écosystème africain, au niveau des infrastructures. En Europe, aux États-Unis, ce sont des jeux au graphisme ultra-développé, avec des effets 3D, etc. Ça ne peut pas fonctionner ici ! En revanche, nous avons remarqué que les gens ici sont très actif sur Whatsapp ou Messenger.

Alors, comment créer un jeu de qualité, classé triple A, tout en s'adaptant aux plateformes avec lesquelles les gens interagissent déjà ?

Nous avons donc imaginé un design unique. Si vous jouez avec un téléphone mobile basique, le jeu apparaîtra via une interface textuelle. Si vous jouez sur Facebook Messenger, vous verrez les premiers graphiques. Si vous jouez sur PlayStation ou X Box, vous aurez la version 3D classique sur ces plateformes.

À long terme, estimez-vous pouvoir créer un nouveau marché ?

Bien sûr. Microsoft, Samsung, Google... toutes ces entreprises sont déjà implantées en Afrique. Les infrastructures se développent, les coûts d'accès aux technologies, à Internet, diminuent. Que se passera-t-il une fois que nous aurons des infrastructures décentes ? Jusqu'ici, l'Afrique ne contribuait pas du tout aux revenus développés par l'industrie du jeu vidéo : sur le continent, nous sommes près d'un milliard d'habitants. Imaginez si seulement 10 % de la population se mettait à jouer pour de bon aux jeux vidéo... 

Il existe déjà sur le continent des jeux ancrés dans la culture locale, par exemple le RPG Aurion développé par Kiro'o Games au Cameroun. Qu'est-ce qui empêche de voir naître une véritable industrie vidéoludique ? 

Le jeu vidéo est encore une niche en Afrique. Mais les professionnels ne communiquent pas entre eux. Vous avez des scénaristes, des graphistes, des dessinateurs, des développeurs de talent dans chaque pays. Mais rien ne permet de les faire dialoguer. Leti Arts, en association avec d'autres studios, a lancé, l'an dernier seulement, sa propre plateforme de publication, appelée Afrocomix, qui regroupe pour l'instant l'animation et la bande dessinée. Reawakening sera le tout premier jeu disponible sur Afrocomix. Si vous faites une recherche en ligne d'entreprises africaines de jeux vidéo, vous verrez que nous sommes fragmentés. Chacun fait son truc dans son coin. En tant que pionniers, nous avons voulu rassembler ces contenus sur une application unique qui deviendra le passage obligé pour qui cherchera un jeu de super-héros en Afrique. On parie que Afrocomix va vraiment changer la façon de consommer.

Par Justine Boulo - Source de l'article Le Point Afrique