Décidément, le cinéma d'animation
a bel et bien sa place au Maroc. Le succès du FICAM (Festival international de
cinéma d'animation de Meknès) en est la preuve. Cette manifestation, qui tient
cette année sa 11e édition (du 15 au 20 avril) a réussi au fil des ans, à
braquer les projecteurs sur le film d'animation.
Mieux, le FICAM, grâce aux
ateliers mis en place en marge de l'événement, a permis à de nombreux jeunes de
développer leur savoir-faire en la matière. «Depuis la première année du FICAM,
notre programme repose sur la formation des jeunes étudiants. Ces formations
ont permis à bon nombre d'entre eux de réaliser des courts métrages d'animation
et de lancer des boîtes de production», affirme le directeur artistique du
FICAM, Mohamed Beyoud. C'est le cas de Younès Mouslih, Rachid Anssari et bien
d'autres, qui ont décidé en 2010 de créer un festival de cinéma d'animation à
Casablanca. «Casanim», prévu du 12 au 16 avril.
À l'instar du FICAM, «Casanim»
prévoit un concours de court métrage, la projection de films d'animation et
l'organisation de tables rondes sur le cinéma d'animation. «C'est une belle
récompense pour le FICAM. Voir de jeunes formés dans nos ateliers, créer un
festival d'animation dans une autre ville que Meknès ne peut que nous
encourager à aller de l'avant», précise Beyoud. Certes, le FICAM considéré
aujourd'hui comme l'un des festivals de cinéma d'animation les plus réputés
(cette année par exemple, le festival aura comme invité Alexandre Petrov (Oscar
1999) et Youri Tcherenkov) a fait découvrir au grand public ce genre
cinématographique à part entière. Toutefois, peut-on parler d'un cinéma
d'animation national ? Les professionnels sont unanimes : le film d'animation
au Maroc en est encore à ses débuts. «Le secteur n'est pas professionnel. En
tant que jeunes, nous trouvons énormément de difficultés à produire nos
réalisations. C'est toujours risqué de produire un film d'animation», précise
Rachid Ansari, secrétaire général de l'association Animaroc, organisatrice de
«Casanim».
En effet, le film d'animation
marocain n'est pas encore arrivé à «arracher» la confiance des producteurs,
encore moins celle des chaînes nationales. «Nos chaînes préfèrent plutôt faire
des achats au kilo que de produire des séries ou des films locaux. C'est une
question purement financière. Vous savez, produire un film d'animation est
coûteux et nécessite la mobilisation de plus de 300 personnes, sans oublier les
difficultés rencontrées pour présenter le dossier aux chaînes nationales», nous
explique Mohamed Slaoui Andaloussi, directeur du studio d'animation Mammoth.
Outre le non professionnalisme du secteur et l'absence de producteurs, le film
d'animation au Maroc souffre de la carence de moyens financiers et surtout du
manque de formation adéquate. En effet, aucun soutien officiel n'a été accordé
jusqu'à présent au secteur. «Les autorités officielles, notamment le CCM, ne
s'intéressent pas au secteur. Aucune subvention n'a été octroyée à un projet
local», ajoute Slaoui Andaloussi.
En finir avec les clichés
Quant à la formation, plusieurs
professionnels estiment que le manque d'écoles spécialisées contribue à ce que
ce cinéma reste toujours embryonnaire dans notre pays. «Nous n'avons pas au
Maroc d'écoles spécialisées en la matière. Les écoles généralistes n'arrivent
pas à former des animateurs», tient à préciser Anssari. Le directeur du studio
Mammoth, lui, pense que l'absence de ces écoles spécialisées s'explique par le
fait que la demande n'est pas encore conséquente. «Le marché de travail au
Maroc a besoin de profils polyvalents et non de profils spécialisés».
De son
côté, le FICAM qui a réussi à dénicher plusieurs jeunes talents tout au long de
ses 10 années d'existence, va bientôt mettre en place une école privée
spécialisée à but non lucratif. «Cette école, dont le siège sera à Meknès,
ouvrira ses portes fin 2011. Le financement sera assuré par Aïcha.
L'objectif
de la mise en place de cet établissement est d'offrir aux jeunes une formation
adéquate», affirme Beyoud. Une aubaine pour les férus du cinéma d'animation marocains.
Cette école pourrait, espérons-le, chasser plusieurs idées reçues sur le cinéma
d'animation. Il faut dire que ce cinéma est associé chez nous à la publicité.
«Vous savez, au lieu de produire des fictions, nous avons malheureusement
réduit le cinéma d'animation à un usage ingrat : la publicité. Il n'y a que
Rachid Jadir (ndlr : le fameux réalisateur de courts métrages en 3D) qui a
réussi à mettre en scène des courts métrages», assure Slaoui Andaloussi.
Attendra-t-on longtemps pour que l'image du cinéma d'animation soit réhabilitée
aux yeux de tous ?
Par Fatima-Ezzahra SAÂDANE
Source de l'article Les Echos Maroc
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