Samir Toudji est un auteur algérien de bande dessinée. Le dessin, une passion de longue date, exprime son caractère sympathique et comique, imprégné d’une imagination inspirée et bluffante.
Crayon en main, cet artiste de 32 ans raconte ses aventures quotidiennes, avec un humour à la fois innocent et auto-dérisoire. Il "gribouille", avec un sarcasme un chouia assaisonné de cynisme, des personnages géniaux et attachants.
Malgré une vocation bien tracée dès son enfance, les débuts de Togui étaient incertains. Après un parcours universitaire indécis, l’illustrateur abandonne ses études et se lance dans le graphisme pour aiguiser son talent.
En dépit de nombreuses prouesses en animation 3D et graphiques, Samir se cramponne à la bande dessinée et remue ciel et terre pour réaliser son rêve.
Lumière sur "Togui", un artiste peu enclin à abandonner son aspiration ... et son délire.
Une attirance irrésistible
"Devenir un auteur de bande dessinée était un rêve d’enfant", révèle-t-il. "Enfant, je dessinais tout seul et j’illustrais au pif. Je m’amusais déjà à reproduire les personnages de bandes dessinées que je lisais."
A l'âge de 13 ans, "Togui" entre à l’Association des Beaux-Arts d’Alger pour apprendre les fondamentaux du dessin. "Ici, j’ai pu assimiler les bases du dessin, comme par exemple les perspectives, les dégradés et quelques techniques de crayon."
Au bout de trois années, Samir quitte cette association, sans pour autant abandonner le dessin. Au lycée, l'envie d'illustrer une BD le pullule déjà. "J'ai commencé à réfléchir avec mon ami à notre première bande dessinée. Nous avions déjà créé les personnages et élaboré le scénario."
Malheureusement, l’idée est rapidement abandonnée, et "Togui" attendra encore sa première oeuvre. En 2001, il est contraint de se consacrer à ses études, pour décrocher son baccalauréat et passer à l’université.
"A la faculté, je ne faisais pas du tout ce que je voulais (...) Je me rendais compte que je dessinais plus qu’autre chose.” Après 4 années passées à l’Université des Sciences et de la Technologie de Houari Boumediene (USTHB), Samir entre à l'Ecole Supérieure des Beaux-Arts d’Alger (ESBAA), où il côtoie d’autres amateurs de la bande dessinée.
"Aux Beaux-Arts, j’ai beaucoup appris au contact des étudiants passionnés et autodidactes. Il m’a été permis d’échanger et de partager de nouvelles techniques de dessin." Pourtant, Samir jette l’éponge au bout d’une année à l’ESBAA et entame en 2006 une carrière de graphiste.
D’une boîte de communication à une autre, l’auteur continue de dessiner et exploiter son talent. "Travailler et dessiner était tout ce qui m’importait." En 2008, il dessine la mascotte de la serrurerie "SofiClef", laissant déjà entrevoir son style et “son coup de pinceau".
A la même année, il confirme sa virtuosité en participant à la première édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Alger (FIBDA), durant lequel son personnage "Togui" voit le jour. Il obtient, à 26 ans, un encouragement de catégorie "Jeune Talent".
Un rêve d’enfant qui prend forme
Inspiré et des idées à en revendre, Samir Toudji ne s'arrête pas là et persévère. En 2009, il tutoie d’autres auteurs de bande dessinée de renommée, grâce à sa participation à un album collectif intitulé "La BD conte l’Afrique", à l’occasion du 2e Festival du Panaf d’Alger.
En octobre 2010, son rêve tant attendu se réalise avec la sortie de son album "Togui Diary’s". "J’étais très content. Depuis le temps que je l’attendais", confie-t-il au Huffington Post Maghreb, avec un sourire généreux au coin des lèvres.
"Avant, je voulais intituler mon album "Togui and Co", pour illustrer mon entourage et mes proches. Au fil du temps, j’ai décidé de centraliser autour d’un seul personnage et raconter ses aventures," explique-t-il.
Édité à l’occasion de la 2e édition du FIBDA, son album "Togui Diary’s" est un recueil de "petites histoires" drôles et loufoques, dessinées auparavant pour la revue El-Bendir et le concours du 1e FIBDA.
Bien qu'il soit content de la sortie de son album, Samir avoue ne pas avoir dessiné ce qu'il voulait, faute de temps avant l'édition de son oeuvre.
A l’origine, "Togui Diary’s" est une bande dessinée autobiographique, que son lectorat aura l'occasion de découvrir dans le deuxième album de Samir Toudji.
"Elle raconte le parcours d’un jeune algérien qui veut devenir bédéiste en Algérie malgré des obstacles qu’il surmonte dans la société algérienne et le milieu de la bande dessinée", explique-t-il.
Une bande dessinée qui promet autant d'humour que de folie, avec cette fois-ci une certaine subtilité manifestée dans l’histoire de Togui.
Un alter-ego auto-dérisoire, pourtant universel
Pour Samir, l’auto-dérision est à la fois un refuge dans un environnement farouche, et un langage perspicace et humain avec son lectorat.
Il entre en immersion dans un univers, où ses états d’âme les plus intimes, se dessinent et prennent forme, pour refléter ceux de toute une génération de jeunes algériens.
Son alter-ego narre aussi son parcours dans un pays où “l’industrie de la bande dessinée est inexistante, sans aucune culture ou politique” mise en oeuvre pour son rayonnement. Une situation qui rappelle celle des artistes algériens, en quête de repères.
"L’histoire que raconte Togui est la mienne," à première vue. Pourtant, nombreux sont ceux qui se rapprochent du jeune dessinateur. Lecteurs, jeunes artistes, et notamment des amateurs de bande dessinée qui se reconnaissent dans chaque trait de caractère de son personnage.
"Mon message aux jeunes algériens : persévérez. Il faut continuer sur son chemin si l’on est convaincu que c’est le bon, malgré tous les obstacles."
L’aventure reste inachevée pour ce jeune artiste, dont les idées continuent à fleurir pour Togui et pour d’autres personnages.
"Je prévois d’arrêter Togui pour une période, et de dessiner d’autres scénarios. Des bandes dessinées animalières, d’heroic fantasy, et pourquoi pas illustrer des légendes algériennes", sur un ton toujours humoristique.
Cela promet!
En attendant son deuxième album, Togui sera présent au Salon International du Livre d’Alger, où un recueil de ses planches sera édité.
Par Mehdi alaoui - Source de l'article Huffpostmaghreb