Une success story est peut-être en route en Tunisie. K’art Studio, une startup spécialisée dans l’animation 3D et les solutions interactives, vient de lever auprès de business angels sans être jamais passée par une organisation d’aide aux entrepreneurs.
K’art, c’est un studio qui crée des produits innovants dans un environnement qu’ils considèrent ne pas toujours l’être. Nous avons rencontré cette équipe de sept personnes dans ses locaux provisoires à côté du port de La Goulette.
L’interactivité dans leur ADN
K’art Studio a pour mission de créer de l’interactivité. Parmi ses faits d’arme, la modélisation, pour le compte du ministère de l’éducation, des composants d’objets complexes, tels qu’un frein à disque, afin d’obtenir une vue éclatée de l’objet et ainsi faciliter la formation des ingénieurs. Dans le même genre, la startup a modélisé les étapes de construction d’un bâtiment afin de permettre aux ouvriers de mieux comprendre le travail à faire. K’art Studio a aussi développé des applications mobiles de réalité augmentée permettant, lorsqu’on filme un objet réel, de faire apparaître à l’écran un personnage virtuel interagissant avec cet objet réel. Effet garanti pour le consommateur ! Enfin, la startup conçoit des jeux vidéo publicitaires (advert games) ou pour les entreprises (serious games).
Mais sa création la plus intéressante reste ses lunettes 3D, semblables à Oculus Rift. La startup, qui réalise notamment des modélisations 3D d’appartements en construction pour permettre aux acheteurs potentiels de visiter virtuellement les lieux à vendre, a décidé de pousser l’immersion interactive un peu plus loin. Elle a développé une sorte de masque de plongée avec un écran intégré permettant de plonger dans l’univers 3D.
Une fois le casque mis devant les yeux, il suffit de lever la tête pour voir le plafond, de regarder vers la gauche pour visualiser une porte et la franchir virtuellement, etc. Le produit fonctionne sur le même principe que Oculus Rift, racheté par Facebook pour deux milliards de dollars en mars 2014, sauf que l’écran a été remplacé par un simple smartphone, ce qui permet de proposer un produit autonome et cinq fois moins cher que la version américaine.
Masque de réalité immersive, présenté lors de l'ApéroEntrepreneurs Tunis en Octobre 2014 |
De la cave à la levée de fonds
Au lancement de K’art Studio, en juin 2013, les trois fondateurs, Mohamed Aloui, spécialiste marketing digital, Mohamed Elyes Chater, ancien chef de projet dans le game design et Hamza Gassam, ancien employé dans le webmarketing (en photo, de gauche à droite, en tête), ont fait le tour des agences d’aide à la création d’entreprise. Mais, l’équipe, découragée par la lourdeur des formalités d’entrée ou par des délais trop importants de traitement de dossier, décide de faire sans. « 2 mois, c’est vraiment beaucoup de temps dans notre activité » nous confie un des fondateurs.
L’équipe s’est donc rapprochée de l’ancien employeur d’Elyes, Walid Sultan Midani, le fondateur de Digital Mania, le pionnier du jeu vidéo en Tunisie. En échange de quelques services, l’équipe fut hébergée gratuitement dans les sous-sols de cette entreprise créée en 2011. K’art Studio a ainsi pu bénéficier d’un environnement de travail stimulant, de synergies entre les équipes ainsi que du mentorat de Walid qui n’a pas hésité à leur faire bénéficier de son réseau et de ses précieux conseils.
Suite à son pitch devant l’accélérateur privé Wikistartup, l’équipe est contactée par trois Business Angels, Naceur Hidoussi DG de Hexabyte (Fournisseur de Services Internet), Slim Bouzguenda Head of development de l’hôtel Medina Hammamet et Nooman Fehri, Député de l’assemblée constituante et ex Head of innovation (UK) chez Atos Origin
La startup se développe aujourd’hui en Afrique et en région MENA, notamment grâce à la proximité culturelle et linguistique qui facilite les échanges commerciaux dans cette zone. Un récent contrat signé aux Emirats Arabes Unis a conforté l’équipe dans sa stratégie.
Innover à contre-courant
Mais l’innovation est parfois difficile à mettre en œuvre. Recruter des jeunes diplômés formés aux technologies utilisés par K’art Studio était presque impossible, confie Hamza. « Les vieux professeurs des universités tunisiennes dispensent de cours préparés il y a quinze ans sans prendre en compte les dernières tendances » se plaint Elyes, pour qui « Les futurs innovateurs seront des autodidactes ». Mais les choses changent, nuance t’il, et certaines universités tunisiennes s’emploient à actualiser leurs programmes.
Elyes a également dénoncé la frilosité des marques à mettre l’innovation au cœur de leurs stratégies : « Nous avons remarqué que les annonceurs cherchent des idées mais ne connaissent pas la réalité des technologies disponibles, donc ils demandent des solutions dépassées tout en proposant des budgets plutôt faibles. » Son associé, Hamza rajoute « Par moments nous avons l’impression que les décisionnaires ont peur de la réaction de leur cible face à un marketing innovant. Nous avons même remarqué que certaines entreprises attendent que leurs concurrents prennent l’initiative pour ensuite les suivre en reprenant la technologie choisie ».
Malgré ces difficultés l’équipe espère se montrer digne du nom qu’ils ont choisi en l’honneur de leur ville. En effet, tout comme Qart-Hadasht (Carthage) veut dire « Nouvelle ville » en Phénicien, K’art Studio signifie « Nouveau Studio ».
Par Charles Dusart - Source de l'article Wamda
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