L’industrie du jeu vidéo génère beaucoup plus d’argent que le cinéma avec ses grands studios et ses blockbusters. Concernant les revenus du esport le cabinet d’audit Deloitte estime que celui-ci générera 500 Millions de dollars en 2016 (une augmentation de 25% par rapport à 2015). Il y a également des stars comme Yoann Merlo, Matthew Haag, et depuis cette année ses propres jeux olympiques dont la première édition se déroulera à RIO en partenariat avec le CIO.
Nous applaudissions les sprinters, les coureurs de fond et voilà que les gamers viennent défendre leurs couleurs comme des sportifs à part entière. Mais quid du reste du monde et en particulier de l’Afrique ? Concernant cette dernière, Dakar a accueilli l’édition 2016 du Game camp Africa du 14 au 17 juillet. Un évènement sur 3 jours, dédié au gaming qui a alterné entre compétitions, workshop et ateliers.
Cet événement dédié au gaming dans plus de 10 pays a été pensé et élaboré par Bacely yorobi, Kofi Sika Latzoo et Farid Arab. Cette initiative a été accompagnée par le Goethe institut du Sénégal après un voyage de Kofi Sika Latzoo en Ethiopie l’année dernière, au cours duquel il rencontra le directeur Afrique du Goethe institut Norbert Spitz qui s’intéresse à la promotion du jeu vidéo en Afrique. Il nous semblait donc nécessaire de rencontrer ces 3 acteurs pour en savoir plus sur le Game camp et le gaming en Afrique.
C’est Kofi Sika Latzoo qui s’est prêté au jeu de l’interview au nom des 3 représentants.
1) J’aimerai bien que l’instigateur de cette édition sénégalaise que j’ai en face de moi se présente et m’en dise plus sur le Game camp.
Je m’appelle Kofi et je suis Directeur de Création, également consultant en design de communication en ce moment pour la chambre des mines du Sénégal (
cmdsenegal.com). Je suis également responsable du programme d’innovation de la Nasa à Dakar sur recommandation de Deborah Diaz, Nasa
Chief Technology Officer for IT (
Spaceappschallenge.org). Appelé également le Space Apps Challenge c’est le le hackathon officiel et publique de la Nasa. J’utilise ma passion pour le jeu vidéo dans l’optique de construire un écosystème durable sur les industries créatives en Afrique par le biais de ma position de créatif stratège et co-fondateur du Gamecamp. Je suis aussi président et fondateur du chapitre sénégalais IGDA qui représente l’association internationale des développeurs de jeu (
IGDA.org) qui a été fondée il y a 3 ans.
Le Game camp c’est un événement un peu sur la base de l’Evénement technologique appelé le barcamp (réunion informelle de personnes dans des ateliers participatifs autour d’un même thème. Ici tout le monde est acteur) mais dédié ici au jeu vidéo. Cet événement qui a été initié en Côte d’ivoire par Bacely Yorobi (l’autre co-fondateur du game camp avec Farid Arab). Au fil des années, l’événement a sû s’enrichir de profils ayant la capacité de développer et d’enrichir chaque édition sur la thématique du jeu vidéo en Afrique. Vivant au Sénégal depuis les prémices, j’ai contribué bénévolement au développement du Game Camp par l’organisation de 30 événements sur le jeu vidéo depuis 2008. Le Gamecamp a trouvé au fil du temps sa structure , son business model , son écosystème géographique devenant une License ouverte qui a permis a d’autres leaders du domaine, d’autres pays de concevoir rapidement un événement attractif , ludique , éducatif et communautaire. Je prendrai Farid Arab comme exemple. Co-fondateur du Game camp, il est aujourd’hui une figure incontournable du monde des TICS et de l’entrepreneuriat au Maghreb. Je peux citer égalemet Moussa Camara , notre lead ingénieur en fibre optique pour la Guinée Conakry que vous pouvez découvrir dans le Magazine Forbes Afrique Edition novembre 2015 .
Aujourd’hui nous sommes présents dans plus de 10 pays, ce qui ne produit pas une source de stress légère mais énorme ! On est passé en moins de 3 ans de 12 participants à 10 000 participants sur 10 pays pour une vingtaine d’évènements en moyenne par an. Le plus difficile est de former des talents et d’être toujours à la pointe de l’innovation tout en gardant un modèle de gestion durable. Le Game camp trouve son originalité et sa flexibilité dans sa structure de contenu événementiel : Des conférences sur l’industrie du jeu vidéo, des compétitions de sport électronique, des « codeathons » et des ateliers de formation aux outils de développement.
2) En quoi cette édition sénégalaise diffère-t-elle des précédentes ?
L’Edition sénégalaise est la version du Game camp que l’on organise pendant l’été en général, et qui peut se dérouler sur 3 jours voire les dépasser. La jeunesse est normalement en vacances et attend du contenu ludique, mais aussi éducatif à explorer en groupe d’amis ou de manière individuelle. Cette édition a été marquée par des premières : une démonstration de la NVIDIA SHIELD a été faite, la premiere Box tv sous Android TV permettant un affichage et un décodage en 4K. Cette box arbore la puissante puce graphique le Nvidia Tegra X1 de 256 cœurs. Cela a réellement été une première en Afrique et au Sénégal.
Par ailleurs, nous avons proposé un premier atelier de création et d’exploration de contenu open source avec le Google cardboard en réalité virtuelle. Un atelier sur le Game design canvas, outil frère du business model canvas animé par le professeur Ingénieur Yves Afoutou, lead du Game camp Sénégal, une première au Sénégal également. Et pour finir, une formation sur Unity (moteur de développement et de rendu de jeu vidéo leader mondial derrière le succès de Pokémon GO) a été dispensée par le Game designer togolais Dadja Bassou. Notons également la présence d’Orange qui a déployé la 4G au Sénégal. En somme, notre collaboration avec le centre culturel allemand Dakar, le Goethe institut a été très fructueuse, car il faut noter que l’Allemagne est un pays phare de l’e-sport en Europe et est considéré comme étant la 5ème économie mondiale du jeu vidéo.
Démonstration de la NVIDIA SHIELD
3) Le marché des jeux vidéo étant supérieur à toutes les industries du divertissement, pensez-vous que l’Afrique puisse être un jour actrice à part entière de ce marché ?
Oui, bien sur ces dernières années les exemples n’ont pas manqué du studio camerounais Kiroo games (
www.kiroogames.com) au studio tunisien digital mania (
http://digitalmaniastudio.com/ ) en passant par le studio sud-africain freelives (
http://www.freelives.net/ ) qui développe Broforce (la licence de jeu appartenant la marque de cinéma the Expendables de Sylvester Stallone). Nous totalisons une dizaine de studios qui ont des produits qui se monétisent sur le continent et à l’étranger grâce aux plateforme Android et iOS, une scène esport en pleine évolution avec quand même 10 économies africaines qui sont dans le top 100 des pays à revenu de consommation sur le jeu vidéo.
Les WESG (World Electronics sport Games) initiés par la division sport Alisports du Géant du e-commerce Alibaba ont des qualifications régionales pour l’Afrique et le moyen orient cette année, c’est une grande nouveauté dans le monde du Esport.
4) Quelles disparités entre les pays africains avez-vous pu observer en rapport avec le gaming et son industrie ?
Question pertinente, la culture influe radicalement sur les usages, la créativité, la perception de l’autre en général et la consommation du divertissement. L’Afrique est divisé en 4 grand blocs comportementaux : l’Afrique du Nord Arabe, l’Afrique de l’ouest francophone, l’Afrique de l’est anglophone et la zone des pays d’Afrique du sud complètement influencés par l’Afrique du Sud et son empreinte occidentale.
Le Game camp a pour objectif justement de faire un seul bloc ou d’interconnecter les différentes régions, les différentes communautés de développeurs et de joueurs pour générer une machine de production autonome qui a la capacité de s’exporter quand on sait par exemple qu’en France nous avons 4000 emplois dans le secteur du jeu vidéo pour 70 pourcent d’exportation et qu’aux états unis la moyenne d’âge du joueur est de 37 ans.
5) En 2017 se déroule la CAN de gaming, en quoi cette compétition impactera-t-elle sur l’évolution du marché et de l’industrie africaine en termes de gaming ?
Pour comprendre une tendance sur une industrie, elle doit être visible, compréhensible et financièrement viable. A l’heure où le sport électronique est un phénomène pour le fait que sur 1 800 000 000 de joueurs dans le monde, 115 000 000 pratiquent le sport électronique, 40 pourcent de cette audience ne jouent pas….
Mais regardent des matchs d’esport comme un match de football. Cette baisse de perception entre le sport et le sport électronique ne fait que se réduire apportant une innovation inattendue. On est passé d’une activité ludique digitale à un réel média qui pèse déjà 1 milliards de dollars, le prix le plus élevé d’un tournoi esport tourne autour de plus de 18 000 000 de dollars. L’impact sur l’industrie du gaming en Afrique est inévitable pour le seul point que le esport ou « compétitive gaming « est un segment de l’industrie du jeu vidéo.
6) Quelles sont les forces du continent Africain sur ce type de compétition, préparation incluse ?
La jeunesse, un joueur pro d’esport a en moyenne entre 15 et 25 ans. Une passion pour le sport qui s’illustre par une passion pour le football qui va faciliter la transition vers l’acceptation du sport électronique en Afrique. Les marques qui investissent dans ce secteur sont déjà présentes en Afrique depuis longtemps, Coca Cola, Red bull, Nissan, Hisense, Orange, Beinsport, Mountain Dew. La dernière frontière géographique pour l’écosystème de l’esport.
7) Pronostics : selon vous et sans chauvinisme : qui gagnera la Can et quelles équipes africaines sont favorites pour la prochaine coupe du monde de esport ?
Si on mise sur l’expérience, l’Afrique du Sud. Les équipes favorites qui ont une bonne expérience en sport Electronique pour compétir à l’international appartiennent au pays comme, l’Algérie, le Ghana, l’Afrique du Sud, le Nigéria, le Sénégal, le Maroc, la Tunisie, Madagascar, le Mozambique et l’Uganda
8) Que vous inspire cette photo ?
La mobilité est le futur du jeu vidéo, le segment a la croissance la plus rapide de l’industrie ces dernières années ; c’est le jeu vidéo mobile. Grâce à des plateformes de streaming comme twitch les jeux mobiles commencent à toucher des audiences impressionnantes dès leur lancement grâce aux fonctions de multi-joueurs et de streaming instantané, effaçant les frontières et les efforts de marketing de lancement.
Par Abdelhamid Niati - Source de l'article
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