Titulaire d'un diplôme d'interprète traducteur -anglais, français, arabe- et maintenant mangaka-bedeiste, scénariste. Coup de projecteur sur Said Sabaou, artiste algérien qui a retrouvé la voie du manga sur un lit d’hôpital.
2009, Tuberculose, une année de sa vie entre parenthèses. Il caresse la mort, il n’a alors que 22 ans et un an de travail en entreprise. "La maladie je la vois comme une bénédiction, cela m’a fait revenir vers le manga…". Il s’imaginait une carrière au sein de la société qui l’avait recruté à la fin de ses études, gravir les échelons et "être marié 5 ans après". Pendant sa convalescence il s’est mis à redessiner, à créer des petits scénarios, "comme ça, pour passer le temps".
A l’âge de 6 ans donc, "pour les copier" il a commencé à gribouiller. Mais très vite il acquiert les techniques de dessin "de manière inconsciente". Un potentiel, une qualité de trait inné lui fait dépasser très jeune les deux frangins qui jadis étaient ses exemples.
Club Dorothée
A 8 ans, il déchirait ses feuilles dans le cahier de classe pour en faire "des storyboards assez détaillés" nous disait l’un de ses frères. "Des épisodes de séries animées qu’il regardait ou ses propres histoires de fiction, il finissait d’ailleurs par être grondé par nos parents parce qu’ils devaient remplacer au moins trois fois de cahiers par an…". Apparemment pas marqué de manière douloureuse par ces punitions, il a continué à grandir dans cet univers. Ses aspirations, il va les chercher dans le club Dorothée. DuChevalier du Zodiaque à Captain Tsubasa, mais son "ultime référence c’est Dragon Ball fait par le papa artistique, Monsieur Toriyama. Il a su créer son univers avec ses lois, ses références sociales, culturelles avant tout le monde".
Said Sabaou dans la tenue de son personnage favori |
Il s’en inspire notamment dans sa vie en général. "Les personnages de Toriyama et surtout Goku le héros principal sont passés par plusieurs épreuves difficiles. Ce dernier a aussi connu la maladie, tout comme moi, il s’est battu contre elle pour revenir encore plus fort! Il n’est pas dans l’organisation ou la planification de sa vie ou de ce qui l’entoure mais dans l’action…En fait je me vois beaucoup en lui, un déconneur qui fonce toujours, qui avance peu importe l’adversité!".
C’est entre autre cette qualité humaine qu’a du repérer Nadia Sebkhi, créatrice et directrice du magazine "Livresq" et qui devient sa "maman artistique". Ils se sont rencontrés au Festival International de la Littérature et du Livre Jeunesse (FELIV) en 2010. "Said est un camarade de ma nièce, il est venu me voir avec ses travaux, et ses planches, nous révèle-t-elle". Intimidé, timoré, gentil tel sont les termes qui lui sont venus pour décrire sa première impression. Puis il lui fait part de "ses rêves en me montrant tout ce qu’il avait déjà réalisé en tant qu’amateur". Elle voit le "talent pur de ce jeune garçon" en qui elle croit "profondément".
Le premier chapitre de son livre Un Prix pour la Liberté |
Elle lui présente dans la foulée Lazhari Labter. Il lui donne deux minutes qui se transforment en une heure et trente minutes. L’éditeur est conquis, Said est maintenant dans le monde professionnel. Cinq mangas plus tard, deux tomes de "Mondialé", deux de "Houma Fighter" et un de "Le Prix de la Liberté", il continue d’évoluer et d’exporter son art. Ses livres sont même exposés au musée international du manga et de la bd à Kyoto, le même où figure Akira Toriyma! Il est le premier algérien à y entrer.
Said a une manière particulière d'exprimer sa joie |
Cette reconnaissance internationale ne lui monte pas à la tête. "Said reste une personne très modeste" assure son frère, "il a le don d’être apprécié par tout le monde".
Par Mourad Icher - Source de l'article Huffpostmaghreb