jeudi 22 juin 2017

Niger : Mahamane Sani Housseyni, joueur professionnel


À 24 ans, le geek et dessinateur nigérien est à la tête de MOGMedia Design, une agence spécialisée dans la conception et la réalisation de jeux vidéos, de films d'animation et de bande dessinées, qu'il a créée il y a deux ans.

C’est au fond d’une cour, dans une pièce exiguë, que se trouvent les bureaux de MOGMedia Design. En gros, on y trouve une chaise, une table, une imprimante, une table lumineuse, une tablette graphique avec écran et, surtout, un ordinateur à l’abri de la poussière sous une housse en plastique. « Mon PC, c’est ma vie », avertit Mahamane Sani Housseyni, 24 ans, directeur général et fondateur de l’agence.

Entrer chez lui, c’est un pénétrer dans l’univers de ses jeux vidéo, films d’animation et autres bandes dessinées. Alors qu’assis dans un fauteuil, son grand-père, regard digne et bienveillant, prie en égrainant son chapelet, son petit frère Rilwane, âgé de 9 ans, sautille en vous accueillant avec un sourire d’ange.

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« C’est lui qui teste mes jeux, précise Mahamane Housseyni – deuxième d’une fratrie de cinq enfants. Il a même écrit une partie de la bande dessinée et du film d’animation Shamsou, le guerrier soleil. » Un héros national qui utilise l’énergie solaire pour combattre et un bouclier en forme de croix de Tahoua pour combattre ses ennemis.

Dans ses animations, on retrouve le chapeau conique des Peuls, l’épée des Haoussa, la croix de Tahoua touarègue…

Une histoire qui lui a inspirée son premier jeu vidéo, « Les Héros du Sahel ». Conçu en 2016, il est depuis peu disponible sur Androïd et PC et a déjà été consulté près de 9 000 fois : son super-héros, Ashirou, vit dans un village de cases et doit faire face aux assauts d’un homme possédé par une entité reptilienne… qui se transforme en margouillat géant.

C’est l’un des amis de Mahamane Housseyni, Flovic, jeune rappeur d’origine congolaise, qui a assuré l’animation sonore. Il vient aussi de lancer « Kashe Macizai » (« Tue les serpents »), un jeu de shooting (« tir ») payant – moins de 1 euro –, qui met en scène un chasseur à l’arc magique.

Toutes les séquences de ses jeux ou de ses films d’animation, qu’il dessine lui-même, sont remplies de détails de la vie quotidienne africaine. On y retrouve le chapeau conique des Peuls, l’épée des Haoussa, la croix de Tahoua touarègue, etc.
"En général, tous les jeux vidéo viennent des États-Unis ou du Japon et aucun ne fait référence à notre continent"
« En général, tous les jeux vidéo viennent des États-Unis ou du Japon et aucun ne fait référence à notre continent, déplore le jeune patron. Alors, pour beaucoup, c’est non seulement gratifiant de savoir qu’un Nigérien fait du jeu vidéo, mais en plus, c’est rassurant de se retrouver un peu dedans. »

Si, dès l’âge de 4 ans, le petit Mahamane défiait l’interdiction parentale pour jouer secrètement à Final Fantasy, Naruto ou Mortal Kombat sur les consoles de ses amis, il lui faudra attendre ses 18 ans pour enfin se procurer sa première PlayStation portable. « Ce qui me fascinait, c’était la façon de pouvoir incarner les personnages fictifs », se rappelle celui qui a pris des cours de dessin dès l’âge de 6 ans, jusqu’à faire sa passion et son métier.

Projet de village intelligent

Fils d’un père diplomate – décédé trop jeune il y a quelques mois -, Mahamane Housseyni a eu la chance de voyager très jeune. Première destination : l’Égypte. « J’en garde les plus beaux souvenirs de ma vie. Au lycée français du Caire, il y avait une super ambiance. J’avais des amis japonais, italiens, allemands… Tout cela était très stimulant. »

Aujourd’hui, Mahamane parle sept langues, dont plusieurs locales. Il a aussi vécu en Arabie saoudite, où il s’est perfectionné dans l’animation, avant de revenir au Niger pour passer le bac et obtenir une licence en communication des entreprises à l’École des techniques économiques comptables commerciales et de communication (Etec).

L’image contient peut-être : texte

Mahamane Housseyni a créé MOGMedia Design en juillet 2015 et, en deux ans, il s’est déjà fait un nom dans le milieu des jeux vidéos et de l’animation en Afrique. En mai dernier, il était invité au Transform Africa Summit de Kigali, au Rwanda, parmi les 50 meilleurs jeunes entrepreneurs du continent.
"Ce que vous faites, c’est bien, et cela peut devenir utile pour notre programme de renaissance culturelle"
Le président Mahamadou Issoufou en personne lui aurait dit : « Ce que vous faites, c’est bien, et cela peut devenir utile pour notre programme de renaissance culturelle. Vous allez jouer un rôle dans l’éducation. »

Depuis, le jeune patron planche sur un projet de village intelligent en partenariat avec le Haut-Commissariat à l’informatique et aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Comme quoi on peut être mordu de jeux vidéosans être un cancre !

Par François-Xavier Freland - Source de l'article Jeune Afrique

Tunisie : Création de la première fédération dédiée aux jeux vidéo

Tunisie : Création de la première fédération dédiée aux jeux vidéo

Le 5ème épisode de l’émission Gamers Arena, première émission Web dédiée au monde du gaming et produite par StreamingHD, a été l’occasion de révéler une information tant attendue par la communauté des gamers en Tunisie, à savoir la création d’une fédération tunisienne du Gaming.

Amine Ghadhab, l’un des fondateurs de la TAG, a été donc l’invité principal de cet épisode, pour parler de la création de cette fédération qui a été l’objectif de la communauté depuis un moment. En effet, Amine a indiqué que, suite à une visite de Ahmed Cheikh Rouhou, qui est le secrétaire général de l’association tunisienne des jeux vidéo, à Majdouline Cherni, ministre de la jeunesse et des sports, le processus a été lancé. Le ministère était, selon Amine, au courant de l’ampleur du mouvement du Gaming en Tunisie et était très favorable à la création d’une fédération, surtout la condition de prouver l’existence de 12 associations dédiées aux jeux vidéo n’est plus exigée. L’accord de principe a donc été établi, il reste uniquement de remplir les exigences du ministère, à savoir la présence des associations requises. Actuellement, Amine a indiqué l’existence de 6 associations.

Des difficultés persistent encore, notamment la réticence à la création de nouvelles, qui nécessitent des financements et des subventions qui peuvent être pénibles aux membres. Or, ce n’est pas uniquement le nombre d’associations qui définit l’ampleur des jeux vidéo en Tunisie. En effet, plusieurs joueurs ne sont pas affiliés à des associations. De ce fait, suite à des négociations entamées avec le ministère, il a été convenu, en quelque sorte, d’étudier, durant une certaine période, le potentiel de ce domaine, avec le nombre de joueurs, le nombre d’associations et l’ampleur de ce phénomène. De ce fait, la fédération serait créée probablement en un mois ou un peu plus.

Pour les facettes administratives, Amine a indiqué que les 3 plus grandes associations ont été contactées pour discuter de la formation du premier bureau fédéral de la future fédération. La liste sera fixée très prochainement, ce qui accélérera la création de la fédération. L’un des objectifs de la fédération était de préparer des tournois qualificatifs aux compétitions internationales, notamment la prestigieuse USF. Amine a indiqué néanmoins que, pour cette année, c’était assez difficile, mais que c’était l’objectif à atteindre pour les années suivantes.

Parmi les grands axes de cette future fédération, l’organisation des compétitions nationales, et la promotion des jeux vidéo. Egalement, le cadre légal qui régit les équipes et les joueurs d’un côté, et les équipes et la fédération. Cette règlementation sera très utile pour gérer, financièrement et administrativement les relations entre les différents acteurs et pour développer le secteur de la manière la plus limpide possible.
Concernant les points relatifs aux jeux couverts par cette fédération, Amine Ghadhab a déclaré qu’ils restent liés aux exigences de la fédération internationale, mais surtout à la popularité du jeu. De ce fait, des titres phares, comme League of Legends, Counter Strike ou encore FIFA seront au rendez-vous.

La création d’une fédération tunisienne dédiée au Gaming est une nouvelle très attendue par toute une communauté. Un réel espoir est porté pour promouvoir ce que beaucoup de pays considèrent désormais comme un sport, voir même une discipline scolaire très prisée par les jeunes du monde entier.

Le 5ème épisode de Gamers Arena est disponible sur Youtube sur ce lien.


Par Seil Eddine - Source de l'article THD

Le spot du jeu tunisien "Hammam Fighter" décroche le Lion d'argent en matière de communication créative

HAMMAM FIGHTER
Le spot du jeu vidéo tunisien développé par un opérateur téléphonique "Hammam Fighter" a réussi à décrocher le Lion d'argent dans le cadre de l'incontournable festival international de la créativité, les Cannes Lions. 
Ce festival qui a lieu tous les ans à Cannes compte parmi les plus prestigieuses manifestations du secteur de la communication créative.
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Avec un humour à la sauce tunisienne, Hammam Fighter met en scène deux femmes tunisiennes qui se battent pour leur clientèle au sein d’un hammam à la manière du fameux jeu mondialement connu "Street Fighter".
Réalisé depuis près d'un an par Mehdi Klibi, cette vidéo continue à séduire et rafler les prix. 10 prix sont actuellement à son actif dont 7 auDubai Lynx Awards et 3 au New York Festival of creativity.
Par Wafa Samoud - Source de l'article Huffpostmaghreb

lundi 19 juin 2017

Tunisie: La startup de gaming «PolySmart» lève 1.5 MDT et ouvrira un bureau à Berlin et Dubai



Une première dans le monde des jeux vidéos en Tunisie et dans le Maghreb. La startup tunisienne spécialisée dans le développement des jeux vidéos «PolySmart SA» a réussi à concrétiser une levée de fond de 1.5 millions de dinars. 

C’est la 4ème levée de fond consécutive de cette jeune entreprise basée à la Marsa. Les 3 autres ont permis de lever déjà 2.2 millions de dinars.

Cette levée de fond est la plus importante dans l’histoire des startups spécialisées dans l’industrie créative en Tunisie et le Maghreb, nous a assuré Haroun Gharbi, CEO de PolySmart SA dans un entretien accordé à THD. Ce jeune de 33 ans est en fait très connu dans le microcosme des gamers en Tunisie puisqu’il gère le studio de jeu «Nuked cockroach» qui est un label géré par PolySmart SA. Ce studio est en cours de développement du jeu VETERANS ONLINE qui a été déjà publié en Beta test réstreinte et qui a connu un succès prometteur.

«Avec cette levée de fond, nous allons pouvoir maintenant continuer le développement du jeu et aller de l’avant dans son lancement commercial et ce, en ouvrant deux antennes : La première à Berlin, Allemagne, dédiée au développement du jeu et la 2ème à Dubai, Emirats Unis, qui assurera la distribution et le marketing du produit sur la région MENA», nous a-t-il déclaré.


Doit-on alors comprendre que l’antenne tunisienne va fermer et ses développeurs vont être mis à la porte ? «Non ! certainement pas !», a rétorqué de suite Haroun Gharbi. «Les développeurs tunisiens vont rester et l’équipe va être renforcée».

D’après le CEO de cette Startup fondée en 2014, les raisons qui l’ont poussée à prendre la décision d’ouvrir une antenne «technique» à Berlin et due au fait que son entreprise a cherché à ramener en Tunisie des pointures dans le développement des jeux vidéos à l’international. «Mais leur assurances leur refusaient carrément de les assurer pendant leur séjour à Tunis. Ils pensent que la sécurité des étrangers en Tunisie est compromise, surtout dans ce contexte régional», s’est-il désolé.

«Plus qu’un financement, l’importance du montant accordé est une affirmation de confiance dans la capacité de toute l’équipe de PolySmart, à atteindre les objectifs espérés et par là ouvrir la voix du financement aux futurs projets dans le domaine du e-sport en Tunisie», lit-on sur le communiqué diffusé par la Startup suite à la signature du contrat avec «CDC Gestion» -un fond d’investissement privé avec participation de l’Etat tunisien à hauteur de 49%- lundi 19 juin. PolySmart SA a été fondée par Haroun Gharbi et ahmed Cheikhrouhou (42 ans).

Par Welid Nefeti - Source de l'article TFD

dimanche 18 juin 2017

Les Tibeb Girls, Ethiopiennes, super-héroïnes et féministes

Bruktawit Tigabu, créatrice des Tibeb Girls.

Un dessin animé plein d’humour met en scène trois filles aux super-pouvoirs qui bousculent les mentalités, éduquent et dénoncent les tabous.

Elles s’appellent Fekir, Tigist et Feteh. Quand elles viennent en aide à des filles en détresse, elles deviennent Power Girl, Empathy Girl et Whiz Kid Girl (« enfant prodige »). Elles, ce sont les Tibeb Girls, les « filles de la sagesse » en amharique, les premières superhéroïnes éthiopiennes.

Leur créatrice, Bruktawit Tigabu, une entrepreneuse éthiopienne, est à l’origine du premier dessin animé pédagogique du pays, Tsehai adore apprendre (« Tsehai loves learning »), où une girafe donne aux enfants des conseils sur les bons comportements sanitaires à adopter au quotidien. Ce programme a séduit des milliers de tout-petits depuis son lancement il y a plus de dix ans. Cette fois, Bruktawit Tigabu, lauréate du prestigieux Rolex Award for Enterprise en 2010, veut dénoncer la condition des femmes dans les zones rurales en Ethiopie à travers la série télévisée d’animation Tibeb Girls.

Dénoncer les tabous

« Les filles font face à tant de défis au quotidien… Elles n’ont pas le même accès aux soins et à l’éducation que les garçons », déplore-t-elle, dans les locaux de son entreprise sociale, Whiz Kids Workshop, qu’elle a créée avec son mari américain Shane Etzenhouser il y a douze ans dans la capitale Addis-Abeba. Selon la campagne Girl Up de la Fondation des Nations unies, une Ethiopienne sur cinq est mariée avant 15 ans, et seulement un peu plus du tiers des adolescentes et des jeunes femmes de 15 à 24 ans sont alphabétisées.

Pour la productrice, c’est malheureusement une question d’attitude qui est devenue la norme à l’école, au sein du gouvernement, et dans la société. « Même les filles ont cette attitude : elles ont des problèmes d’estime de soi. Elles ne croient pas en elles car on leur a appris qu’elles ne valaient pas grand-chose, poursuit-elle. C’est mon devoir de montrer aux Ethiopiennes qu’elles ont du potentiel. »

Capture d’écran des les Tibeb Girls, les « filles de la sagesse » en amharique, les premières superhéroïnes éthiopiennes. CRÉDITS : DR

A travers les Tibeb Girls, elle veut « toucher le cœur des gens ». « Les superhéros, ce n’est pas un concept tout neuf », reconnaît-elle. Mais dénoncer les tabous à travers un dessin animé divertissant peut permettre de toucher le grand public et d’ouvrir le dialogue, argumente-t-elle.

Dans l’épisode pilote, traduit en amharique, en anglais et en français, les superhéroïnes viennent en aide à la petite Hanna, vendue à un époux plus âgé qu’elle. Les trois jeunes femmes parviennent à la libérer de l’emprise de sa communauté, et d’un mariage non désiré. La série aborde des sujets variés comme les violences conjugales, le mariage précoce ou les menstruations, souvent vues comme quelque chose de honteux dans le pays.

Elle évoque également les changements du corps et les bouleversements psychologiques liés à la puberté. Une période lors de laquelle les adolescents ont « besoin de tellement de soutien », remarque Bruktawit Tigabu, qui regrette que les troubles psychologiques des enfants ne soient pas vraiment pris en charge en Ethiopie.



Une leçon de courage

Les superhéroïnes, vêtues d’une robe traditionnelle et d’une cagoule, ont chacune une histoire difficile. Leurs pouvoirs – voler, voir dans l’avenir et ressentir les émotions des autres – n’agissent que lorsqu’elles sont réunies. Sinon, ce sont des filles ordinaires. « Les Ethiopiennes doivent se soutenir, s’entraider, reconnaître leurs problèmes, et ne pas se laisser définir par eux. Je veux faire ressortir ce qu’elles ont de meilleur en elles, que n’importe quelle fille se dise : “Je peux être une héroïne !” », poursuit la créatrice.

L’entrepreneuse et son équipe sont désormais à la recherche de distributeurs et de financements, afin de produire plusieurs saisons des Tibeb Girls, et de diffuser le programme non seulement en Ethiopie, mais aussi dans d’autres pays africains. Le premier épisode, financé en partie grâce aux subventions de l’ONG américaine Rise Up et par les ventes des livres pédagogiques que Bruktawit Tigabu édite, a coûté plus de 30 000 euros.

L’Ethiopienne a déjà d’autres idées pour la suite de la série. Sa source d’inspiration ? Les filles qu’elle rencontre et qui lui donnent à chaque fois une leçon de courage. Comme lors de cet atelier dans le Wolaita, au sud du pays, où une jeune femme l’a légèrement provoquée, lui expliquant que l’une d’entre elles avait été vendue à un homme contre un téléphone portable. « Que vas-tu faire face à cette situation ? », a-t-elle demandé, cherchant une solution. Ce que souhaite Bruktawit Tigabu ? « Que les filles se disent : “Lève-toi et bats-toi !” » pour la vie des femmes en Ethiopie.

Par Emeline Wuilbercq - Source de l'article Le Monde Afrique

jeudi 8 juin 2017

La Fissure : entre photo et BD, un ouvrage fort sur la crise des migrants

Couverture de La Fissure, aux éditions Gallimard. (© Carlos Spottorno, Guillermo Abril)

Après avoir remporté un prix au World Press Photo pour leur documentaire Aux portes de l’Europe, le photographe Carlos Spottorno et le journaliste Guillermo Abril publient La Fissure aux éditions Gallimard. 

Entre photo et bande dessinée, leur ouvrage dessine singulièrement les failles qui craquellent l’Europe petit à petit depuis plusieurs années.
Extrait de La Fissure, aux éditions Gallimard. (© Carlos Spottorno et Guillermo Abril)

Le 3 octobre 2013, une embarcation venue de Libye fait naufrage près de Lampedusa : 366 personnes y perdent la vie. Une catastrophe humanitaire qui attire alors l’attention sur l’augmentation des flux migratoires provoquée par nouveaux conflits secouant le monde. En Espagne, la rédactrice en chef d’El Pais Semanal demande alors au journaliste Guillermo Abril d’aller voir ce qui se passe aux frontières de l’Europe et de se rendre dans les endroits "les plus chauds".

La crise migratoire n’en est qu’à ses prémices, pourtant les frontières européennes apparaissent déjà comme des avant-postes hostiles où la violence peut éclater à tout moment. Quand le journaliste espagnol part en janvier 2014 avec le photographe Carlos Spottorno, ni l’un ni l’autre ne sait que durant les deux années qui viendront, ils seront amenés à partir six fois aux quatre coins de l’Europe. De ces voyages, au cours desquels ils ont vu l’utopie européenne se fissurer violemment, ils ont rapporté 25 000 photos et 15 carnets de notes.

Chroniques à bord d’une frégate italienne
Extrait de La Fissure, aux éditions Gallimard. (© Carlos Spottorno et Guillermo Abril)

Dans un premier temps, les deux compères se rendent "aux portes de l’Europe", où ceux qui fuient les atrocités de leur pays natal tentent de traverser les frontières, portés par l’espoir d’une vie meilleure. Comme à Melilla, ce lopin de terre espagnol situé dans le Nord du Maroc, encerclé par des grillages dignes du Mur de Game of Thrones. Sauf que ces derniers ne repoussent pas d’affreux Marcheurs Blancs mais des hommes faits de chair et de sang, en l’occurrence majoritairement des Syriens…

Face à eux, se dressent les hommes de la guardia civile qui surveillent la frontière depuis leurs ordinateurs, prêts à partir en chasse au moindre signe d’intrusion… Les journalistes poursuivent ensuite leur périple au large de Lampedusa, embarquant sur une frégate italienne mobilisée, à l’époque, pour prévenir de nouveaux naufrages, après celui du 3 octobre 2013.

Carlos Spottorno et Guillermo Abril naviguent plusieurs jours avec les militaires lorsqu’ils rencontrent un bateau de migrants à la dérive. Guillermo Abril ne cache pas l’exaltation qui l’a alors saisi, étant le premier journaliste à assister à une telle scène. Ce dont il ne se doutait pas, c’est qu’au cours des mois suivants ces sauvetages exceptionnels deviendront tristement banals. Les naufrages, eux, n’ont pas cessé, comme nous le rappellent les deux bateaux qui ont chaviré au large de la Libye le week-end du 8 mai.

Sur les photos que Carlos Spottorno prend ce jour-là, à bord de la frégate italienne, on voit les visages marqués des femmes, des hommes et des enfants, à la fois soulagés d’être sauvés et inquiets de ce qui les attend. Parmi ces images admirables, se trouve notamment cette photographie magnifique qui deviendra la couverture de La Fissure, où l’on voit une jeune fille syrienne passer des bras d’un homme qui semble être son père à ceux d’un Italien dont le visage est couvert d’un masque hygiénique. Elle regarde l’objectif. À cet instant précis, son avenir est en suspens entre le pays natal, symbolisé par le père, et le pays d’accueil, représenté par le militaire.

Vers l’Est

Extrait de La Fissure, aux éditions Gallimard. (© Carlos Spottorno et Guillermo Abril)

Après avoir écumé les postes-frontières, Carlos Spottorno et Guillermo Abril se tournent vers l’Est, où le retour d’une Russie expansionniste, après l’invasion de la Crimée, inquiète les dirigeants du monde occidental. Carlos et Guillermo se rendent aux frontières de la Pologne, de la Lituanie mais aussi de l’Ukraine, où des militaires américains, canadiens et britanniques viennent enseigner leur stratégie aux troupes locales pour résister à une potentielle invasion.

Sur les photos, des soldats de l’Otan manœuvrent des chars fabriqués en URSS. Bien que la situation puisse sembler cocasse, un goût amer vient à la bouche, celui de "l’Histoire qui se répète". Le fantôme de la Guerre froide habite aussi les jeunes Lapons qui, au-dessus du cercle polaire, à la frontière russe, s’entraînent dans le plus grand froid en vue d’une éventuelle mobilisation. La Finlande, elle aussi, a augmenté son budget militaire et, bien qu’elle ne fasse pas partie de l’Otan, elle ne cesse de lui envoyer des signes pour former une coalition.

À plusieurs reprises, Carlos Spottorno photographie les points de démarcation entre les pays : ce passage à vide où la terre n’appartient plus à personne. Pourtant, il ne faudrait pas se fier au silence de ces no man’s land car ils ne sont qu’un voile fin entre deux mugissements grondants. D’un côté comme de l’autre, on s’observe. Et le moindre faux pas pourrait tous nous mener à l’issue fatale.
Extrait de La Fissure, aux éditions Gallimard. (© Carlos Spottorno et Guillermo Abril)

Un message pour les citoyens européens

C’est pour faire entendre ce constat alarmant sur l’Europe, mais aussi sur le monde (car l’Europe ne fait qu’assumer les conséquences de tensions internationales), que Guillermo Abril et Carlos Spottorno ont choisi cette forme de récit. Insérées dans des planches de bande dessinée, toutes les photos ont bénéficié d’un traitement chromatique qui leur confère un grain rappelant la trace du fusain sur le papier.

Case par case, le texte didactique de Guillermo Abril encourage une lecture facile, à même d’intéresser un large public. La Fissure s’adresse ainsi à chaque citoyen européen pour l’aider à mieux saisir les enjeux de ce troisième millénaire et qu’il ne se sente pas dépossédé de cette histoire, la leur, la nôtre.

Pendant deux ans, le journaliste et le photographe ont parcouru les confins de l’Union européenne pour en tâter le pouls et examiner son État. Entre la crise migratoire, la montée des extrêmes et les pressions venues de Russie, le diagnostic qu’ils en tirent dans La Fissure est alarmant.

Face au caractère fulgurant de la crise, un seul remède pourrait faire ses preuves, celui du dialogue et de la cohésion, mais il est trop lent. Sur la dernière page, une photo de Carlos Spottorno, resplendissante de bienveillance, fait jaillir un peu d’espoir. Le texte de Guillermo Abril, lui, est pessimiste, évoquant une Troisième guerre mondiale. Deux pronostics, deux avenirs possibles, et un seul monde pour choisir.

Par Paulina Gauthier Mons - Source de l'article Kombini

mardi 6 juin 2017

La BD au Maroc : en attente de lecteurs… (première partie)


À première vue, le Maroc peut passer pour un pays où la bande dessinée est reine : le pays a abrité ou abrite plusieurs festivals de bande dessinée (Tétouan, Fès, Kénitra, Casablanca) et compte avec l’Institut National des beaux-arts de Tétouan, la seule filière BD de l’Afrique francophone. 

Malheureusement, la production de BD au niveau local ou dans la diaspora reste faible et la BD reste un genre mineur au Maroc, même si l’on constate un certain frémissement depuis quelques années. Pourtant, le marché du 9ème art s’est longtemps plutôt bien porté au Maroc…

Les titres les plus populaires étaient des œuvres traduites en langue arabe (« Goldorak », « Bissat-Errih », « Tarzan »), des magazines pour la jeunesse provenant des pays du golfe tels que Majid et Bassem, mais aussi des illustrés et albums en français : ZemblaPif, les productions Marvel ou des classiques du genre « Tintin » et « Astérix » ou des éditions Disney. 
Peu de productions locales, cependant. À partir des années 1990, le marché s’effondre à l’exception de quelques poids lourds comme Majid ou Disney. Vingt ans après, cet art ne s’est toujours pas imposé dans la société marocaine. En 2011, un article du journal marocain (Le Matin) estimait qu’il n’y avait pas plus de 4 ou 5 publications par an et que les ventes moyennes ne dépassaient pas les 500 exemplaires[1]. La BD est en général considérée comme une sous-littérature réservée aux enfants. En conséquence, le nombre d’auteurs est également très faible et se compte sur les doigts des deux mains [2].

Retour sur une histoire vieille de plus de 50 ans
La première trace d’une bande dessinée marocaine remonte à l’époque coloniale, lorsque le journal catholique Cœurs vaillants connaît durant l’occupation une édition africaine à Casablanca.

 Plus tard, en  1950  exactement, « Sakr Assahra » (« Le Faucon du désert ») - une BD d’une vingtaine de pages en arabe, due à un auteur inconnu – est diffusée :  à Tétouan.
Les productions suivantes remontent au début des années 1960.
Il s’agissait de planches publiées dans des journaux et revues, en particulier dans deux revues satiriques créées par Hamid Bouhali et Mohamed Filali : Tekchab et Satirix.
Ce dernier titre avait pour sous-titre « Journal de bandes dessinées politiques » et proposait des planches de BD, très critiques sur un plan social, dessinées par Filali Mohamed, Hamid Bouali et Sebbane.
Une autre revue satirique a été publiée au début des années 1980 : Chaouch Bouchnak.

Chaouch Bouchnak.
Puis, de 1982 à 1990, le Maroc lance l’une des rares tentatives africaines d’utilisation de la BD à des fins pédagogiques, avec « À grands pas : histoires en bandes dessinées » (imprimerie Najah El Jadida) : un ensemble de livrets d’histoires en bande dessinée destinée aux élèves de l’enseignement fondamental. Ils faisaient partie de la collection Ensemble pédagogique pour l’enseignement du français et étaient édités par le ministère de l’Éducation nationale.

Le manuel pour la 4ème année primaire (1988), par exemple, contenait trois histoires : « Top 1 fait la soupe » (19 planches), « Myzoul et Safa » (29 planches) [3] et « Aladin et la lampe merveilleuse » (36 planches).
Comme pour « Sakr Assahra », on ignore les noms du scénariste et du dessinateur.
Celui pour la 5èmeannée primaire (1990) proposait trois autres histoires : « Robinson Crusoé », « En chute libre », « Ali Baba et les 40 voleurs ».
« À grands pas : histoires en bandes dessinées ».
La BD marocaine a d’autres spécificités qu’il est bon de souligner.

Les BD « politiques »

Le Maroc est l’un des très rares pays africains où la BD a servi de relais à des témoignages dénonçant des atteintes aux droits de l’homme et des exactions des forces de police et de sécurité.
En Afrique, si les dessinateurs de presse et caricaturistes ne s’en privent pas, les bédéistes sont en général plus discrets et attendent le plus souvent d’être en exil pour témoigner.
Tel n’est pas le cas de Abdelaziz Mouride (1950–2013) qui, en 2000, a publié « On affame bien les rats ! » (éditions Tarik et éditions Paris Méditerranée), témoignage poignant de ce que furent les années de plomb au Maroc. Dans la pénombre de sa cellule, l’auteur, membre fondateur du courant d’extrême gauche 23 mars, a dessiné jour après jour toutes les étapes de sa longue et traumatisante détention.

« On affame bien les rats ! ».
En 2004, Abdelaziz Mouride publie « Le Coiffeur » (éditions Nouiga), chronique douce-amère d’un salon de coiffure pour hommes dans un quartier populaire du Casablanca des années 1970.
Le propos est plus léger que dans son précédent album, mais la critique sociale et politique affleure à chaque planche.
Professeur aux beaux-arts de Casablanca, il avait lancé en 2004, avec ces étudiants, le magazine Bled’Art, premier journal de BD du pays, lequel ne dura que quelques numéros.
Abdelaziz Mouride s’est éteint le 8 avril 2013, après une longue maladie [4]. Il avait longtemps travaillé à une adaptation du roman « Le Pain nu »de Mohamed Choukri, qu’il a eu le temps de finir avant de décéder, mais qui n’a jamais trouvé d’éditeur.

« Le Pain nu ».
Autre témoignage des années de plomb, celui de Mohammed Nadrani dans « Les sarcophages du complexe : disparitions forcées » (éditions Al Ayam, 2005) qui, avec un style plus naïf, revient sur cette période et son lot de prisonniers politiques. L’auteur a été incarcéré dans un centre de détention connu sous le nom de Complexe de Rabat. D’où le titre de la BD, associant les pénibles conditions d’incarcération des jeunes militants des années 1970 à des sarcophages [5].
En 2014 et 2016, le Congolais Gildas Gamy résidant alors au Maroc, a sorti pour l’AMDH (Association marocaine pour les droits de l’homme) deux albums pour l’abolition de la peine de mort au Maroc : « Raconte-moi l’abolition de la peine de mort » et « Mortel moratoire ». En avril 2015, est sorti le premier tome d’une BD intitulée « Je m’appelle Ali Aarass » (sous-titre « La Vie d’avant »), qui retrace l’histoire d’un détenu politique. Mais, œuvre du français Manu Scordia, il ne s’agit pas à proprement parler d’une BD marocaine.

Planches originales de « Je m’appelle Ali Aarass ».
Les BD « patrimoniales »
La bande dessinée a également été utilisée à des fins patrimoniales, en vue de raconter la culture et l’histoire du pays et d’en dessiner ses figures émergentes.
Ce fut le cas en 1979, avec « Il était une fois… Hassan II » (de Serge Saint-Michel, Bernard Dufossé et Philippe Sternis, aux éditions Fayolle, en arabe ou en français ; voir Bernard Dufossé : encore un talent réaliste bien oublié…) qui n’était pas du tout une BD marocaine, relevait cependant de l’album panégyrique, du fait d’un soutien financier du régime Marocain.
D’autres albums de la même équipe sortirent sur le même modèle à la même époque sur Ceauscescu, Eyadema…


« Il était une fois… Hassan II ».
En 1993, la trilogie « Histoire du Maroc en bandes dessinées » (dessins d’Ahmed Nouaiti, scénario de Wajdi et Mohamed Maazouzi) évoquait l’histoire nationale de la préhistoire à 1961.


« Histoire du Maroc en bandes dessinées ».
En 2004, l’Institut Royal de la culture amazighe (ICRAM) publiait la première BD en langue berbère, intitulée « Tagellit nayt ufella » (« La Reine des hauteurs ») qui raconte les aventures d’une jeune reine luttant contre les forces du mal pour protéger son peuple. L’objectif premier de cet album d’une vingtaine de pages, réalisé par Meryem Demnati, était d’aider à la promotion de la langue et de la culture amazighe.
Douze ans après, sortaient les deux premiers tomes d’une série bilingue (arabe/amazigh) intitulée « Notre histoire » et qui abordait deux personnages historiques importants du Maroc antique (T1 : « Chachnak », T2 : « Jugurtha »). Ils étaient l’œuvre de l’éditeur Creative studio, scénarisés et dessinés par Madriss Oumadi, avec l’appui à l’écriture d’Éveline Beaulak.
Mohamed Nadrani a sorti, en 2007, un second ouvrage où il se penche sur un pan récent de l’histoire marocaine : la guerre du Rif à travers la biographie de Abdelkrim El Khattabi.
Cet album, « L’Émir Abdelkrim », est sorti en deux versions, arabe et française, aux éditions Al Ayam. Il a aussi été édité aux Pays-Bas, pays qui compte une grande communauté marocaine.


« Raconte-moi la nouvelle moudawana ».
Enfin, le nouveau code de la famille a fait l’objet d’une adaptation bilingue (arabe dialectal et français) intitulée « Raconte-moi la nouvelle moudawana » afin de le rendre plus accessible à la population aussi bien résidente au pays qu’immigrée.
            « El Hadj Belaïd » de Larbi Babahadi (éditions Sapress, 2007) relate l’incroyable destin du chanteur marocain L’Haj Belaïd, devenu une légende dans son pays.
Après de nombreux petits boulots, le souissi décide un jour de se consacrer à sa passion : la musique. Il se lance en chantant l’amour et la beauté des femmes, et devient bientôt une célébrité, apprécié de Lyautey et de Mohammed V. Il enregistre de nombreux disques avec le label français Pathé Marconi. Il s’éteint en 1946 et ses chansons sont souvent reprises par la jeune scène musicale marocaine.

Ce premier album au dessin simple et efficace sur des textes en français, amazigh et arabe, est une réussite. L’année suivante, Larbi Babahadi autopublie, avec son frère (Mahfud), « Les Racines d’Argania », album mettant en scène des figures mythologiques grecques ayant foulé le sol marocain.
En 2017, Babahadi publiera un album sur le tremblement de terre qui a détruit en partie Agadir en 1960.
Plus récemment, en 2015, le réalisateur Ayoub Qanir a souhaité raconter l’histoire de la marche verte en bande dessinée.
Pour réaliser ce projet, il a confié l’écriture du scénario au journaliste Omar Mrani et les dessins à l’illustrateur Juan Doe, habitué des productions Marvel. Ce projet, qui doit paraître en trois langues (français, anglais et arabe) devrait sortir en 2017.


« La Marche verte » d'Ayoub Qanir par Omar Mrani et Juan Doe.
« Tempête sur le Bouregreg ».
Le Maroc connaît également une production régulière d’albums pédagogique et de sensibilisation.

C’est le cas de « École de qualité » (2004) et « Notre vie, notre environnement » (2006) : deux ouvrages publiés sous l’égide de l’UNESCO par Mohamed Benmessaoud, professeur d’arts plastiques à Tanger. Celui-ci a aussi publié avec A Chbabou, une série de 16 fascicules sur l’histoire de l’islam en langue arabe. L’agence pour l’aménagement de la vallée du Bouregreg a sorti, en 2008, « Tempête sur le Bouregreg » (dessins : Hassan Maanany, ancien élève de l’INBA, sur un scénario de l’éditeur Miloudi Nouiga) pour expliquer aux plus jeunes les travaux qui vont profondément modifier les villes de Rabat et de Salé. Par ailleurs scénariste et éditeur, Miloudi Nouiga a dessiné « Les Objectifs du millénaire », album portant sur les droits des enfants au Maroc, pour le PNUD en 2006. Ces deux albums ont été distribués gratuitement aux écoles marocaines par ces institutions.
Quelques éditeurs se sont lancés dans la publication de bandes dessinées. C’est le cas du peintre, illustrateur et éditeur Miloudi Nouiga, au sein de la maison d’édition qu’il a créée : Nouiga.

« Maroc fatal » par Jean François Chanson, chez Nouiga.
Il y publie un premier album de Jean François Chanson en 2006 : « Maroc fatal ». L’album est constitué de quatre nouvelles racontant le destin singulier de Marocains et leur rencontre souvent violente avec la mort. Le titre est un clin d’œil au célèbre « Major fatal » de Moebius.
Ces histoires en noir et blanc n’hésitent pas à évoquer des thèmes dérangeants comme le hrig, les problèmes de prostitution, l’alcoolisme, les nouveaux rapports hommes femmes, les tensions arabo-amazighes ou la corruption policière.
L’une des nouvelles, « Destins symétriques », croise les destins similaires d’un Occidental et d’un Marrakchi. En arabe et en français, le récit est organisé en miroir, jouant sur les sens convergents de lecture des deux langues.
En juin 2008, Chanson lance un deuxième album chez le même éditeur, une suite de « Maroc fatal », intitulée « Nouvelles Maures ».
« Nouvelles Maures ».
En 2010, Jean-François Chanson encadre un album collectif sur l’émigration, « La Traversée, dans l’enfer du H’rig ». Ce ne sont pas mois de 18 auteurs français (Alexandre Clérisse, Cédric Liano, Nathalie Logié Manche, Patrice Cablat, Louis Hugues Jacquin, Jean-François Chanson), africains (l’Ivoirien Sékou Camara, le Congolais Gildas Gamy et le Camerounais Yannick Deubou Sikoué) et marocains (Ahmed Nouaiti, Malika Dahil, Khaled Afif, Mohamed Arejdal, Issam Bissatri, Larbi Babahadi, Miloudi Nouiga, Abdelaziz Mouride, Ismaïl Ezzeroual, certains étant diplômés de l’INBA de Tétouan ou des étudiants des Beaux-arts de Casablanca) qui abordent le thème de ces jeunes Marocains ou originaires de pays d’Afrique subsaharienne qui tentent le passage illégal vers l’Europe via le nord du Maroc.

En 2017, Nouiga sortira l’album pour la jeunesse « Le Chien des Oudayas », dessins de Hassan Maanany et scénario de Jean-François Chanson.
En 2010, ce dernier avait sorti, chez Yomad éditions, un mini-album, « Tajine de lapin », autour du nouveau tram reliant Salé et Rabat (en français, arabe et amazigh).


« Tajine de lapin ».
En 2014, Yomad sort une nouvelle BD avec l’appui de l’Ambassade de France au Maroc et l’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) : « Nisrine et la corruption », dans le cadre d’une campagne de sensibilisation à la corruption à destination de la jeunesse.
En 2012, une maison d’édition spécialisée en bande dessinée voit le jour à Casablanca : Alberti, créée par Saïd Bouftass avec l’aide de Jean-François Chanson. Cinq albums suivront jusqu’en 2013. Ce sera tout d’abord un mini-album à vocation écologique : « Foukroun et les tortues de la Maâmora » de Chanson et Hervé Furstoss.
Suivra, l’année suivante, « Les Enfants du royaume » (de Jean-François Chanson et Nathalie Logié Manche) sur la situation des enfants au Royaume. Puis ce sera « Tagant : la forêt des mystères » d’Omar Ennaciri, une fable écolo-futuriste. Ce dernier a obtenu en 2016 un prix au concours libanais Mahmoud Khalil pour un projet financé par le ministère de la Culture, « Le Défi », déjà primé au festival de Tétouan la même année. Le Gadiri  avait publié précédemment, en Algérie, « Abîme » chez Dalimen édition en 2012.
« Les Passants ».
Alberti a aussi publié « Les Passants » de Brahim Raïs : bel album pacifiste sans dialogue relatant les actions d’un sniperdurant une guerre non nommée.
Cet album avait été auparavant édité en Algérie chez Dalimédition. Plus tard, en 2016, Brahim Raïs éditera un deuxième album chez le même éditeur : « Le Grand Silence ».
Enfin, « Aïcha K. » de Damien Cuvillier et Jean-François Chanson qui traite d’une histoire d’amour entre adolescents dans le Haut Atlas. L’album sortira en trois versions : arabe, français et amazigh.
En 2012, le groupe INWI diffuse une série en ligne, « Switchers » [6]. Alberti décide d’en faire une adaptation en BD, avec des étudiants de l’École des Beaux-Arts de Casablanca et Malika Dahil, ainsi que Jean François Chanson, au scénario. Un album sort en 2013. Depuis, Alberti est en sommeil, laissant un important sentiment de frustration derrière lui. Contrairement à la série, « Switchers » n’aura pas de tome 2.

En 2016, Nouiga sort un autre ouvrage, « Anyuu » : objet hybride à cheval entre le livre illustré et la BD, qu’il dessine lui-même sur un texte de Camilia Cherif-Messaoudi. 

Soutenu par l’Ambassade de France, cet album partait de la quête d’un voleur à la recherche d’une lame invincible.
À suivre…





[2] Confirmé par cet article du Soir échos : 
[3] Pour visualiser quelques extraits : 
[5] Dans son ouvrage « I Fumetti nel Maghreb », Bepi Vigna signale une autre BD : « Dans les entrailles de ma patrie » ; mais il s’agit probablement d’une erreur.


Dessin de couverture de « BD Maroc » par Jean Gabel.

Par Christophe Cassiau-Haurie - Cet article a bénéficié de l’apport sympathique et précieux de Jean François Chanson, Amine Hamma et Choubeila Abassi.- Source de l'article BDZoom