vendredi 13 septembre 2013

Production : Des cartoons arabes corps et âme, pourquoi pas ?

Tout semble prêt pour une aventure bien animée en vue de produire des cartoons purement arabes pour pallier le manque dont souffre cet espace géographique.

Dans les années 80, la télévision tunisienne avait entrepris une petite aventure en doublant quelques séries de cartoons en arabe. Plus précisément en utilisant le parler tunisien. L’expérience, en son temps, fut très appréciée. Et l’on ne voit pas pourquoi elle ne le serait pas maintenant. Qu’est-ce qui s’est passé, à ce moment-là, pour que quelqu’un songe à faire ce travail avec toutes les difficultés imaginables ? Qu’est-ce qui s’est passé aussi pour qu’aujourd’hui, avec les moyens techniques et technologiques que l’on connaît, personne ne réédite ce travail ?

Il y aurait plusieurs réponses. La première c’est que toutes les chaînes TV passent des séries toutes faites, fin prêtes et qui n’attendent que la diffusion. A quoi bon se fatiguer à traduire, à doubler, à exécuter des bruitages, à créer des sons etc. ? L’autre c’est peut-être une question de droits d’auteur. On n’en sait rien de façon certaine. Il existe d’autres considérations beaucoup plus subtiles qui n’échapperont pas à la perspicacité de nos lecteurs. Aussi n’entrerons-nous pas dans les détails.
Rappelons toutefois ces mémorables scènes ou gags de «Nakkar Ezzahouani» (Woody Woodpecker) ou «Krinet Echalouech» (Squiddly Diddly) ou encore «Chbeieh» (Casper) et autres «Moufettech Kaaboura»…
La période où ces dessins animés étaient diffusés est encore gravée dans la mémoire de plusieurs spectateurs, tant parmi les enfants que parmi les grands. Comment expliquer cet engouement pour ces D.A de la part des responsables de la programmation à la télé et, plus simplement, du très large public?
 
Parler la langue du public visé
Loin de tout purisme ou de toute autre réflexion philosophique, le but du doublage des voix, et en parler local, était de distraire et en même temps éliminer la distance entre l’image et le texte d’un côté et le public de l’autre. Le spectateur, l’enfant en l’occurrence, ne devait pas sentir fortement ce dépaysement linguistique et visuel. Autrement dit, il ne devait pas entendre une langue qui n’est pas celle qu’il parle (les dessins animés étaient généralement doublés en français) et voir des scènes auxquelles il n’est pas habitué ou des stéréotypes qui lui sont étrangers (l’image du cochon, du loup etc…) qui ne font pas partie de notre background culturel.
L’intention telle qu’elle est énoncée était bonne. Et comme premier effort dans ce sens, cela était louable. Toutefois ce qui est demandé, actuellement, c’est d’aller plus avant dans la prospection et dans la recherche pour produire des dessins animés qui soient vraiment les nôtres. La Tunisie a réalisé des dessins animés plus ou moins réussis. Des producteurs plus ou moins professionnels n’ont pas du tout été rebutés par la tâche en dépit des contraintes matérielles notamment. Mais toutes ces expériences sont restées isolées dans le temps et dans l’espace.
C’est seulement grâce à la publicité que quelques créateurs se livrent à leur passion. Mais la création artistique telle qu’elle doit être pour ce 8e art n’est pas au rendez-vous. Et pour cause.

Il est temps d’agir !
Investir dans ce domaine (financièrement et culturellement, cela s’entend) n’est pas uniquement du ressort d’un individu ou d’une société ni même d’un seul pays arabe. La production dans un secteur aussi sensible que celui de l’audiovisuel pour l’enfance exige bien des sacrifices, mais surtout une grande volonté, disons-le, politique.
N’oublions pas que beaucoup de dessins animés que nous avons vus, que nos enfants ont vus, et que leurs enfants verront si rien n’est fait aujourd’hui, sont sous-tendus d’un discours xénophobe ou intolérant. L’image de l’Autre est presque toujours dévalorisée (l’Arabe ou le Moyen-oriental, le Chinois, le Mexicain, le Noir et on en passe…) Le Blanc (Européen ou Américain) est toujours présenté comme l’être transcendant.
Cette représentation schématique et manichéenne n’a rien d’étonnant. L’auteur est dans son droit d’imaginer ce qu’il veut et de défendre le système qui lui convient. Ce qui montre la nécessité de réagir pour nous protéger de ces clichés surannés, mais dont la dangerosité n’est pas à négliger.
Par A. Chraiet - Source de l'article Tunisia Today

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