La chronique BD de Kidi Bebey. Michel Bagoe et Stéphanie Destin offrent une nouvelle vie au célèbre roman de l’écrivain martiniquais Joseph Zobel.
Chronique. Tout commence en 1926 sur l’île de la Martinique, possession de la France depuis 1635. L’histoire se joue dans un petit espace : une rue, un bourg et les propriétés agricoles qui les environnent. Comparé au vaste monde, c’est à peine plus grand qu’un confetti. De cet endroit minuscule, le romancier Joseph Zobel (1915-2006) va pourtant faire surgir le grand spectacle de la vie à travers les ouvriers de la canne à sucre parmi lesquels il a grandi. Bien que quatre-vingts ans aient passé depuis l’abolition de l’esclavage, la vie de ces travailleurs n’est toujours que misère, dureté et conditions de vie effroyables.
De tout cela, Zobel va faire le récit, donnant visages et voix à un peuple dont il restaure la dignité et la fierté. Pour parvenir à une telle recréation, il imagine un duo idéal : l’enfant – José, son double – qui ne sait encore rien du monde et la grand-mère qui en sait tant qu’elle préfère en adoucir les contours. Sous le stylo magique du romancier, les mots disent le réel tout en contribuant à le transcender, et c’est ainsi que s’édifie l’un des témoignages les plus forts et sensibles d’une époque où l’on a peu de représentations des Noirs antillais dans la fiction.
Les éditions Albin Michel refusent le manuscrit en raison de ses tournures inspirées du créole. Alioune Diop, lui, ne s’y trompe pas et édite La Rue Cases-Nègres dans sa toute jeune maison, Présence africaine. On est en 1950. Le roman fait date en France, mais aussi bientôt sur le continent africain, où Zobel part s’installer en 1957, au Sénégal. Outre des fonctions d’enseignant administrateur, il anime une émission culturelle, « L’université radiophonique », très écoutée dans les pays de l’Afrique occidentale française.
« Un pan important de l’histoire mondiale »
La Rue Cases-Nègres débute alors une carrière éditoriale de « long-seller ».L’histoire part à la conquête du grand public lorsqu’elle est portée à l’écran par la cinéaste Euzhan Palcy, en 1983. Le film remportera de nombreux prix. Mais, bien avant cela, Joseph Zobel compte parmi ses élèves de Ziguinchor un jeune garçon antillais, Michel Bagoe, fils d’un professeur du même lycée. Les deux familles se fréquentent et s’apprécient, les enfants nouent des liens, tant et si bien que l’histoire ne s’arrêtera pas avec le décès du romancier, en 2006.
Michel Bagoe, devenu musicien et auteur, commence en juillet 2015 l’adaptation en bande dessinée de La Rue Cases-Nègres. Il s’adjoint le talent de Stéphanie Destin, jeune illustratrice et graphiste, dont le travail mêle dessin réaliste et peinture numérique aux tons vifs. Ils travailleront deux ans à réédifier l’histoire. « Ayant connu Joseph Zobel, je me sentais une certaine légitimité à scénariser son roman, explique Michel Bagoe. D’autant qu’il n’a pas seulement raconté sa vie, mais véritablement notre histoire, qui est un pan important de l’histoire mondiale. »
Publiée début 2018 par Présence africaine, La Rue Cases-Nègres en bande dessinée est une nouvelle déclinaison d’une œuvre devenue un classique « et qui mérite d’être portée à la connaissance des publics de tous les âges et en particulier des jeunes, qu’ils soient des Antilles, d’Afrique ou d’ailleurs », conclut le scénariste, pour qui « cette BD représente à la fois un hommage et un acte d’engagement ». Symbole du lien littéraire qui unit les Antilles et l’Afrique, cet album raconte aussi, à sa manière, l’histoire d’une belle et cohérente continuité éditoriale.
“GAMES & COMICCON DJAZAIR” était une véritable réussite auprès des fans. Tout âge confondu, ils sont venus participer aux différentes activités et concours proposés
Pour la première fois en Algérie, l’événement Pop Culture qui s’est tenu le 23, 24 et 25 Mars au Palais de la culture Moufdi Zakaria a rassemblé tous les amoureux du Gaming, du Cosplay, du cinéma et du Pop art.
Pour l’équipe Global Advanced Solutions la toute première édition “GAMES & COMICCON DJAZAIR” était une véritable réussite auprès des fans. Tout âge confondu, ils sont venus participer aux différentes activités et concours proposés.
En effet, un chiffre de près de 8 000 visiteurs/ jour (soit près de 24 000 au totale) a été enregistrés lors de cette édition.
Nous avons eu des moments forts avec la participation des invités de marque, des stars dans leur domaine à l’instar de la vice-championne de France en gaming Kayane, le vice-champion du monde en 2010 Gen1us, le spécialiste en effets spéciaux Samy Lamouty et le fabuleux El Moustache. Aussi trois champions français du Cosplay, en l’occurrence Gatz, Chimeral et Yukihina, sont venus accompagner en tant que jury le premier concours de cette édition qui a révélé de nombreux talents.
Les tournois gaming organisés dans différente catégories (Tekken, FIFA 2018…) ont vu la sélection de 96 participants qui ont disputé la finale avec brio.
Le moment incontournable de cette édition 2018, était bien évidemment le concours Cosplay qui a confirmé son succès auprès des fans, puisqu’il a vu la participation d’une quarantaine de jeunes talents qui ont offert un show inoubliable lors de ce concours avec la présentation de 25 mises en scène devant le public et le jury.
GCCDJ c’était aussi des expos enrichissantes, des débats passionnant, des rencontres fabuleuses et des moments de fêtes, de musique et de danse.
Tibeb Girls est un dessin animé éthiopien dans lequel trois jeunes filles utilisent leurs super-pouvoirs pour bousculer les mentalités, éduquer et dénoncer les tabous. On adore !
Habillées d'une robe traditionnelle, d'une cagoule et d'une cape de super-héros, Fekir, Tigist et Feteh sont les super-héroïnes éthiopiennes de « Tibeb Girls » (« filles de la sagesse » en amharique), un dessin animé féministe qui bouscule les mentalités.
Créé par l'entrepreneuse Bruktawit Tigabu, le trio vole au secours de jeunes éthiopiennes, prises au piège des tabous et mentalités du pays. Pour aider les filles en détresse, elles se réunissent et se transforment en Power Girl, Empathy Girl et Whiz Kid Girl car leurs pouvoirs (voler, voir dans l'avenir et ressentir les émotions des autres) n'agissent que lorsqu'elles sont ensemble. Autrement, elles sont elles-mêmes des petites filles tout à fait ordinaires... Par ce processus, Bruktawit Tigabu veut montrer aux jeunes éthiopiennes qu'elles doivent se serrer les coudes et agir ensemble pour pouvoir faire bouger les choses et prendre leur destin en main.
Un dessin animé qui dénonce les tabous
La créatrice a imaginé ce dessin animé plein d'humour pour dénoncer la condition des femmes éthiopiennes dans les zones rurales de son pays. Violences conjugales, mariages forcés et précoces, menstruations, changements physique et psychologique dus à la puberté... Les Tibeb Girls, n'ont peur de rien et abordent tous les sujets qui fâchent, que la société éthiopienne élude et cache.
« Les filles font face à tant de défis au quotidien... Elles n'ont pas le même accès aux soins et à l'éducation que les garçons », déplore l'entrepreneuse. « Elles ont beaucoup de problèmes d'estime de soi. Elles ne croient pas en elles car on leur a appris qu'elles ne valaient pas grand-chose... C'est mon devoir de montrer aux Éthiopiennes qu'elles ont du potentiel » poursuit-elle.
Une créatrice dévouée, qui veut se faire entendre
À travers les Tibeb Girls, la productrice veut « toucher le cœur des gens ».
« Les superhéros, ce n'est pas un concept tout neuf. Mais dénoncer les tabous à travers un dessin animé divertissant, ça peut permettre de toucher le grand public et d'ouvrir le dialogue ! » argumente la jeune femme.
Le premier épisode de la web-série originalement en amharique a ainsi été traduit en français et en anglais, une façon de toucher plus de monde et de sortir des frontières éthiopiennes... En attendant plus de financement pour développer son projet, Bruktawit Tigabu essaye de vendre la première saison de Tibeb Girls à plusieurs chaînes de télévision éthiopiennes. L'entrepreneuse aimerait diffuser son programme en Éthiopie, mais aussi dans d'autres pays africains, touchés par les mêmes problèmes.
Par Mélanie Hroorakvit - Source de l'article Biba Magazine
La chronique BD de Kidi Bebey. Barly Baruti et Christophe Cassiau-Haurie proposent une aventure trépidante qui explore, en creux, les enjeux sociaux et environnementaux congolais.
Chronique. Illustrateur et baroudeur né à Kisangani, en République démocratique du Congo (RDC), Barly Baruti s’est fixé au royaume de la bande dessinée, Bruxelles, d’où il ne cesse de faire rayonner son style. Formé au dessin, comme nombre de talents actuels, au sein de la fameuse Académie des beaux-arts de Kinshasa, il mène d’album en album – une trentaine au compteur ! – une démarche inlassable de militant de l’image, désireux d’évoquer sa terre d’origine, sa culture, ainsi que les liens qui perdurent avec l’ancienne puissance coloniale. « La RDC peut paraître lointaine, comme si elle ne concernait plus vraiment la Belgique, mais la relation continue et a pris de nouvelles formes, qui nous regardent tous, que nous en ayons conscience ou pas », rappelle-t-il.
Dans son nouvel opus, Le Singe jaune, il s’est associé à Christophe Cassiau-Haurie, spécialiste français de BD africaine et fin observateur, lui aussi, des liens qui unissent la Belgique et la RDC. Le duo, qui avait déjà signé, en 2014, un Madame Livingstone situé en Afrique centrale, s’est reformé pour donner naissance au « singe jaune », espèce fictive de primate jusqu’alors inconnue et dont la découverte, médiatiquement orchestrée, suscite d’emblée l’interrogation du monde scientifique. S’agit-il d’une information fiable ? Sinon, que peut cacher cette prétendue découverte ? Paulette Blackman, une jeune reporter belge dont le nom est un clin d’œil à la bien réelle Colette Braeckman, va quitter Bruxelles pour aller en sonder la véracité au cœur de la forêt vierge.
Biodiversité et métissage
Nous plongeons à sa suite dans une série d’aventures trépidantes qui sont aussi à lire comme un récit à clés, car la BD va évoquer tour à tour les problématiques de la biodiversité, de l’exploitation abusive des ressources du sous-sol, des enfants-soldats et, au bout du compte, du métissage dont ce mystérieux singe jaune constitue le symbole. « J’ai voulu intriguer le lecteur avec cette idée d’un animal improbable afin d’aborder tous ces thèmes », dit Barly Baruti. Le résultat est un scénario échevelé et touffu, où l’on a parfois du mal à trouver son chemin, une aventure aussi inattendue sans doute que les surprises, bonnes ou mauvaises, qui surgissent au cœur de la forêt lorsque la touffeur équatoriale révèle les limites de chaque être ou que l’usage des armes fait basculer les destins.
Dans des pages encombrées de lianes, fiévreuses et comme obscurcies par la malhonnêteté des hommes, Paulette Blackman et ses compagnons d’aventure sont progressivement amenés à interroger leur vision du monde. Ils nous ramènent, ce faisant, de l’aventure au réel. Oui, notre Terre est belle, mais il est urgent de la préserver. Et oui encore, dans ce smartphone dernier cri que nous sommes si nombreux à vouloir posséder se cache le coltan dont l’extraction fracasse l’univers de populations entières, là-bas, en RDC. En continuant d’acheter au Nord ces produits qui déséquilibrent le Sud, ne sommes-nous vraiment pour rien dans l’absurde fonctionnement du monde ?
“Sghirek Yetfanen” (petits artistes), tel est le titre choisi par le DigiArt Living Lab “DALL” de l’association tunisienne des technologiques créatives “CREATEC” pour le festival de la création numérique au profit des enfants qui se tiendra le 22 et 23 mars à l’institut français de Tunis et le 24 à la maison de culture de Nabeul.
Cette manifestation culturelle est organisée en collaboration avec le Conseil Général de Développement Régional et la direction régionale de l’éducation du Cap Bon.
La fondatrice et directrice du DigiArt Living Lab, Samia Chelbi a fait savoir que le festival “Sghirek Yetfanen” fait suite à la clôture des ateliers de production de contenu créatif et numérique assurés par le living Lab (D.A.L.L) durant 4 mois avec des écoles et des collèges de la région de Nabeul.
Chelbi a précisé que les ateliers ont permis aux élèves accompagnés par leurs éducateurs d’apprendre la 3D, l’animation et les techniques de production de jeu vidéo afin de transformer le contenu pédagogique enseigné en film ou jeu vidéo.
Le festival sera une occasion pour les enfants de présenter leurs travaux devant le grand public. Les travaux seront aussi soumis devant un jury composé des élèves de même tranche d’âge. L’objectif est d’inculquer de nouvelles compétences aux enfants, à savoir présenter et discuter leurs travaux devant un public.
“Sghirek Yetfanen ” offrira aussi durant 2 jours des ateliers de création numériques gratuits aux élèves des écoles et collèges en vue de promouvoir le secteur de la création numérique.
Ces ateliers seront animés par des professionnels des technologies numériques et créatives. Les formateurs seront assistés par les élèves qui ont déjà profité des ateliers de production. Cette approche permet d’inculquer chez les élèves l’esprit de partage et leur permet de développer leur capacité en communication et le sens de responsabilité chez les élèves.
DigiArt Living Lab “DALL” est le premier laboratoire vivant tunisien et maghrébin spécialisé dans la technique 3D, l’animation et les techniques de production de jeu vidéo. C’est un espace pour accueillir les compétences désireuses de développer leur pouvoir créatif dans le domaine des technologies numériques.
DigiArt Living Lab “DALL” bénéficie de l’appui du programme “Tfanen” initié par l’Union Européenne en Tunisie et piloté par le British Council.
Le programme détaillé de festival “Sghirek Yetfanen” est le suivant :
Les amoureux de la pop culture auront rendez-vous, du 23 au 25 mars, avec la première édition du Comic Con. Un événement organisé au Palais de la culture Moufdi-Zakaria, destiné aux fans des films, comics, mangas, gaming et cosplay.
Le Comic Con débarque dans la capitale algérienne, du 23 au 25 mars, pour investir les espaces du Palais de la culture Moufdi-Zakaria. Organisé pour la première fois en Algérie, cet événement destiné aux amateurs de films, comics, mangas, gaming, cosplay et tout ce qui a trait à la pop culture, verra la participation d’invités internationaux.
Pour annoncer les grandes lignes de cet évènement, une conférence de presse a été animée dimanche par les organisateurs, à savoir l’agence d’événementiel Global Advanced Solutions (G A Solutions), représentée par Inès Fraihat. Elle a ainsi présenté les participants, dont Samy Lamouti, qui “a contribué aux effets spéciaux sur plusieurs films hollywoodiens à gros budgets tel que Dr Strange, et Blade Runner”, a-t-elle fait savoir. Durant cette conférence de presse, les intervenants sont revenus sur l’importance de la culture populaire en tant que partie intégrante du patrimoine algérien. À ce propos, l’artiste plasticien El-Moustach a indiqué : “Si on ne crée pas notre contenu en suivant les médias modernes, il y aura des vides qui seront remplis par d’autres cultures.” Il a par ailleurs relevé les dangers qui guettent la culture algérienne et la nécessité de résistance face à l’influence du cinéma et des séries. “Si on ne crée pas notre culture en valorisant notre histoire, les autres vont se la réapproprier”, a-t-il alerté. Autre volet du comic-con, les jeux vidéo qui font depuis plusieurs années, l'objet de vives discussions et de sérieuses controverses. “Par rapport aux jeux vidéo il y avait toujours le cliché du geek qui est renfermé sur lui-même, mais maintenant on remarque l’évolution des jeux vidéo qui dépasseront l’économie et l’industrie du cinéma pour ce qui est du budget”, s’est réjouit El-Moustach.
Un secteur très familier pour Samy Lamouti, qui a indiqué que ce qui a fait le succès de la culture populaire c’est aussi le succès du cinéma de Marvel. Pour lui, ça a changé complètement la donne. “C’est tout le monde qui veut faire des films de supers héros parce qu’il y a beaucoup d’argent dedans, et ce n’est pas tout le monde qui réussit”. Et de renchérir : “Ces films sont devenus populaires grâce à la technologie, qui nous permet de réaliser des choses qu’on ne pouvait pas faire avant.” Toutefois, pour Samy Lamouti, le marché des adaptations des comics n’est pas pavé de succès. “Aux États-Unis, à voir les tentatives d’adaptation de BD, ou de comic book en films ou en séries, c’était des flops, parce qu’ils n’étaient pas bien produits, à l’exception de Marvel studio qui a vraiment mis beaucoup d’argent et de temps pour le développement du Marvel Universe”.
À noter que pendant trois jours, le Comic-Con prend ses quartiers au Palais de la culture, où une série d’événements aura lieu en même temps que dans quatre différentes zones, appelés “villages”. Dans le village principal, il y aura tous les exposants (T-shirts, goodies, ambassades et sponsors), il abritera aussi un espace enfant où auront lieu des cours et show de dessins, face painting et show maquillage, ainsi que des échanges entre collectionneurs de BD, atelier Cosplay. Il est prévu également l’implantation d’un village des artistes, de gaming et un autre dédié au direct. Cette manifestation sera également marquée par différentes conférences, notamment celles de Samy Lamouti le samedi à 14h45, et celle d’El-Moustach, qui co-animera aussi une rencontre sur les comics : “La guerre secrète de la pop-culture”, le samedi à 13h. Pour les intéressés l’entrée est à 300 DA.
Après de nombreux mois de travail acharné, nous avons le plaisir de vous dévoiler notre nouveau projet intitulé “GamersMagh”.
Un projet plein d’ambition puisque GamersMagh sera le premier site web maghrébin spécialisé dans le gaming et la pop culture. Plein de nouveaux domaines seront couverts avec ce nouveau site, comme le high-tech et le cinéma.
L’équipe de reporters s’étend au-delà des frontières, couvrant le Maroc, l’Algérie et la Tunisie. L’équipe travaille ensemble pour vous offrirle meilleur de l’actualité maghrébine. Avec tout ça, sachez que le site web n’est pas la seule nouveauté. En effet, le projet vise encore plus loin, on est impatients de partager tout ça avec vous quand le temps sera venu, alors restez avec nous !
Si vous voulez ne rien rater des événements et de l’actualité 100% maghrébine, n’hésitez pas à suivre notre nouvelle page Facebook @GamersMaghreb, et à visiter notre nouveau site web http://www.gamersmagh.com/ qui sera lancé très prochainement.
La chronique BD de Kidi Bebey. Deux garçons cherchent un oiseau qu’ils croient avoir blessé… et découvrent une vieille femme. Une aventure à la fois réaliste et pleine de mystère.
Chronique BD. Articles, textes dramatiques, scénarios, romans… Florent Couao-Zotti écrit comme il respire. « C’est d’autant plus important que je n’ai pas d’autre métier ! » fait-il remarquer dans un éclat de rire. L’auteur béninois est repéré au milieu des années 1990, lorsqu’il signe une pièce de théâtre, Ce soleil où j’ai toujours soif (L’Harmattan, 1995), puis le premier roman qui le fait entrer sur la scène littéraire, Notre pain de chaque nuit (Le Serpent à plumes, 1998). Depuis, il a aligné avec régularité une douzaine d’autres textes dans des genres divers – nouvelles, romans, polars – et destinés à des publics de tous les âges, notamment aux adolescents pour son fameux Charly en guerre (Dapper, 2001), qui évoque la problématique des enfants soldats.
Avec Le Lance-pierres de Porto-Novo, Couao-Zotti propose, cette fois, un album pour les plus jeunes, planté dans le décor de la capitale du Bénin, où il est installé depuis une quinzaine d’années. « J’avais envie, explique-t-il, de faire voir et de réinventer les lieux emblématiques de Porto-Novo. Je n’en suis pas originaire, mais je porte cette ville dans mon cœur depuis les vacances que j’y passais, enfant, auprès de l’un de mes oncles. Alexandra Huard, l’illustratrice à l’origine du projet, est venue plusieurs fois au Bénin et a été fascinée par les couleurs du pays. Elle m’a donné l’occasion de me raccorder un peu à mon enfance, que je ne parvenais plus à raconter dans mes textes. »
Chenue, étrange et solitaire
Deux garçons partent à la recherche d’un bel oiseau qu’ils croient avoir mortellement blessé à coups de pierres. Mais au lieu du volatile soudainement disparu, c’est une vieille femme qui attire leur attention. Les deux pourraient bien, en effet, former une seule et même personne. Ne dit-on pas que, « lorsqu’ils reçoivent de trop gros coups, les oiseaux se transforment en humains pour supporter le choc et éviter d’en mourir » ? Se sentant aussi intrigués que coupables, les deux garçons vont suivre la vieille dans les rues de la ville, jusqu’à sa maison.
Ils découvrent alors avec stupéfaction que sa cour abrite une véritable volière où les oiseaux viennent par dizaines, paradant et voletant, échangeant avec elle comme des humains au sein d’une cour de notables. Et si la vieille était une dangereuse sorcière, comme le murmurent les mauvaises langues du quartier ? D’ailleurs, la rumeur ne cesse d’enfler, les adultes s’inquiètent de ce que cette femme chenue, étrange et solitaire pourrait faire aux enfants qui sont entrés chez elle. Ils s’en alarment tant qu’ils préviennent la police. Et les gendarmes embarquent la pauvre vieille, sans autre forme de procès. Que va-t-il lui arriver ?
Le travail chatoyant d’Alexandra Huard accompagne subtilement la magie du texte de Florent Couao-Zotti et ajoute à l’émotion de cette petite enquête, à la fois réaliste et pleine de mystère. « J’adore son trait et ses couleurs, dit l’écrivain. Elle a mis en images ce que je souhaitais : qu’un enfant lisant ce livre puisse se dire qu’un petit jeu peut être le début d’une aventure… qui elle-même peut devenir grave. De plus, les oiseaux appartiennent à notre environnement. On peut les admirer, jouer avec eux, sans pour autant les agresser, car leur mouvement dit l’ailleurs, le reste du monde. Leur mouvement est poésie. »
« Les enfants nous font avancer »
Comme dans ces contes où d’une petite chose presque sans importance peut naître une catastrophe, un simple caillou lancé avec maladresse risque bien de conduire à la mise à mort d’une grand-mère dont le seul tort est de vivre différemment des autres gens. A moins que les garçons, prenant conscience de la portée de leur acte, ne parviennent à mettre un terme à la folie des hommes…
« Les enfants savent mieux que nous qu’il ne faut pas toujours se fier aux apparences, rappelle Florent Couao-Zotti. Cette vieille femme que l’on accuse de sorcellerie est en réalité une âme en peine. Les deux garçons de mon histoire comprennent qu’il faut la défendre ou compatir à son sort au lieu de l’isoler comme le font les adultes, qui la mettent au ban de la société. On dit que les enfants sont naïfs, mais ce sont eux, en réalité, qui nous font avancer. »
Finalement libérée, la vieille offre aux garçons ces paroles de sagesse : « Le plus fort n’est pas celui qui possède une arme mais celui qui choisit de ne pas l’utiliser. » En refermant le livre, le lecteur soulagé se rassure : l’oiseau n’est pas mort, mais la peur s’est envolée. Reste ce lance-pierre de Porto-Novo, sur lequel est gravée l’image d’un masque de cérémonie guèlèdè. Une image complexe et ambivalente, comme le cœur tiraillé des êtres humains.
Cette année, le Festival international du cinéma d’animation de Meknès (FICAM) a décidé de mettre en avant les femmes dans l’animation.
Quelques heures avant la conférence inaugurale de Brenda Chapman, première femme à avoir remportée un Oscar pour la réalisation d’un long métrage d’animation, c’est la productrice française Judith Nora qui a donné, vendredi 16 mars, le premier “work in progress” de cette édition.
Cette dernière développe en effet une adaptation au petit écran de la série de BD de la dessinatrice française Pénélope Bagieu, “Culottées”. Une série qui dresse les portraits en bande dessinée de 30 femmes oubliées par l’Histoire et qui cherche à les réhabiliter et faire “voler en éclats les préjugés”.
Vous pourrez ainsi découvrir celui de Naziq al-Abid, née en 1887, indépendantiste syrienne et militante pour les droits des femmes, mais aussi Agnodice, gynécologue interdite d’exercer la médecine dans l’antiquité grecque (et qui bravera l’interdit), Annette Kellerman, Australienne à qui l’on doit l’invention du maillot de bain pour femmes, ou encore Lozen, chamane et guerrière apache...
C’est à la médiathèque de l’Institut français de Meknès, où se déroule la quasi-totalité des conférences du FICAM, qu’a eu lieu le “work in progress”. Une présentation réalisée devant un public composé majoritairement de jeunes femmes et au cours de laquelle Judith Nora a dévoilé les premières images de la série animée.
De “Connasse” à “Culottées”
“Culottées” n’est pas la première aventure dans l’animation pour la productrice. Judith Nora et son associée Priscilla Bertin fondent leur société de production Silex Film en 2009, qui produit d’abord des longs métrages “classiques”. Elles sont également derrière un des succès télé les plus connus de ces dernières années, la série “Connasse”, plus tard adaptée en film. Mais ce n’est qu’en 2013 que la société se lance dans l’animation par le biais de la série animée “Les aventuriers de l’art moderne”, diffusée sur la chaîne franco-allemande Arte.
Pour “Culottées”, Silex Film s’est associée avec une autre société de production française, Agat Films, qui détenait les droits de la BD de Pénélope Bagieu mais qui a décidé de s’associer avec les productrices. Commence alors un long travail d’adaptation pour les équipes de la série courte car, comme l’explique le modérateur Alexis Hunot, “la BD et l’animation sont deux langages différents”.
GALLIMARD
Rendre hommage à la femme
Jusqu’à cette année, Judith Nora ne connaissait pas encore le festival de Meknès, ”étant une débutante dans l’animation” explique-t-elle au HuffPost Maroc.
Elle entend parler du FICAM alors qu’elle présente “Culottées” au Festival international de bande dessinée d’Angoulême en janvier 2018. Elle rencontre alors Mohamed Beyoud, directeur artistique du FICAM, qui lui propose de présenter le projet à Meknès, le festival étant cette année dédié aux femmes.
“Mohammed Beyoud avait adoré ‘Les aventuriers de l’art moderne’. Pour lui, présenter un ‘work in progress’ de ‘Culottées’ était une bonne manière de rendre hommage à la femme”, déclare Judith Nora.
Il faut dire que le court métrage d’animation reste un des rares milieux dans le cinéma où les femmes sont plus présentes que les hommes. Une féminisation qui n’apparait pas cependant au niveau des longs métrages d’animation. “On y travaille”, assure la productrice.
De Miramax à 50/50
Judith Nora a d’abord débuté dans le cinéma dit “classique”. À 19 ans, elle s’envole pour les États-Unis où elle travaille pour la boîte de production Miramax, société fondée par les frères Weinstein et connue aujourd’hui pour être le “point zéro” du mouvement de libération de la parole autour du harcèlement sexuel. À l’époque, elle travaille avec Judith Goldstein, seule femme productrice de la société.
Aujourd’hui, Judith Nora est mobilisée dans la lutte contre le harcèlement et pour une plus grande représentation des femmes dans le cinéma français par le biais de 50/50 en 2020. “Ce collectif que l’on a monté en France, à l’initiative de l’association Deuxième regard, est un lobby politique participatif pour pousser les politiques à mettre en place des outils pour assurer la parité dans les salaires et les représentations”, explique la productrice.
Pour Judith Nora, le message de “Culottées” peut à la fois toucher un public français mais également en dehors des frontières de l’Hexagone. “On universalise des problématiques tout en racontant des histoires très intimes et concrètes de parcours de femmes”, conclut-elle. La série devrait être diffusée en format 3 minutes à l’horizon 2019.
En dix ans d’existence, la saga Assassin’s Creed aura traversé bon nombre d’époques: la troisième croisade, la Renaissance italienne, la Révolution américaine, l’âge d’or de la piraterie, la Révolution française, la Révolution industrielle anglaise et dernièrement, l’Égypte antique en 49 av. J.-C avec Assassin’s Creed Origins.
Ainsi, l’Histoire est l’essence même de la licence Assassin’s Creed, qui en a fait sa marque de fabrique. Pour chaque jeu, les équipes des studios Ubisoft doivent emmagasiner une quantité astronomique de connaissances, que ce soit sur les modes de vie, l’architecture, le contexte politique, la géographie… Pour cela, des historiens ont été engagés par les studios pour chaque jeu, qu’il s’agisse d’un spécialiste des armes des pirates au 18e siècle ou encore d’un égyptologue. N’en déplaise aux puristes de la vieille école, Assassin’s Creed est bien une ressource digne d’intérêt pour qui s’intéresse à l’Histoire, et aujourd’hui plus que jamais grâce à son nouveau concept: le Discovery Tour.
LE DISCOVERY TOUR: QU’EST-CE QUE C’EST?
Si l’Histoire sert de base aux scénarios inventés par les équipes d’Ubisoft, elle est aujourd’hui au centre même du nouveau mode créé par les studios: le Discovery Tour. «Le Discovery Tour est une expérience nouvelle pour en apprendre sur l’Égypte antique en utilisant toute la puissance de frappe d’Assassin’s Creed. Nous mettons à disposition le monde que nous avons recréé pour le jeu de base, mais nous avons enlevé toutes les histoires et tous les combats pour les remplacer par 75 tours audioguidés, comme au musée», explique Jean Guesdon, directeur créatif de la saga. Ce concept a été créé suite à des discussions avec plusieurs enseignants en 2014, lesquels étaient impressionnés par la qualité du travail d’Ubisoft, mais regrettaient de ne pouvoir utiliser le jeu à des fins éducatives à cause notamment de la violence (le jeu est lui même déconseillé aux moins de 18 ans).
Ces 75 tours sont divisés en 5 catégories différentes: l’Égypte, les pyramides, Alexandrie, la vie quotidienne et les Romains. Parmi ces catégories, de nombreux thèmes sont abordés comme la médecine d’Égypte ancienne, l’éducation à Alexandrie, le Nil, les déserts égyptiens, ou encore les hiéroglyphes. Chaque visite dure en général entre 4 et 10 minutes, afin de ne pas perdre l’attention du joueur (du touriste ou du visiteur, on ne sait plus vraiment comment l’appeler!). En démarrant un tour, une ligne jaune apparaît et nous dessine le chemin à suivre. Elle comporte plusieurs points de passage sur lesquels les visiteurs s’arrêtent pour écouter les informations et voir plusieurs documents historiques. Il est également possible pour le visiteur de s’arrêter sur des petites plateformes blanches qui permettent à son personnage de jouer une action selon le lieu où il se trouve. Pour vous donner une idée, voici le tour sur la grande bibliothèque d’Alexandrie.
ASSASSIN'S CREED ORIGINS DISCOVERY TOUR : LA GRANDE BIBLIOTHÈQUE D'ALEXANDRIE
UN PROJET LIBÉRATEUR POUR LES ÉQUIPES D’ASSASSIN’S CREED
Les reproductions historiques des différents jeux Assassin’s Creed sont extrêmement impressionnantes pour tout connaisseur d’histoire. Maxime Durand, historien chez Ubisoft, s’amuse même à raconter, non sans fierté, une anecdote liée au jeu Assassin’s Creed 3 (2012). «Pour Assassin’s Creed 3, qui se déroule en pleine Révolution américaine, nous avons reproduit la Old State House de Boston. Le musée de Boston nous a félicités puisque notre reproduction était bien plus précise et fidèle à la réalité de l’époque que la leur!»
Pour arriver à un tel degré de précision, les développeurs d’Ubisoft se transforment en chercheurs assidus. «D’abord, nous regardons beaucoup de séries et de films qui ont lieu dans les périodes qui nous intéressent. On regarde ce qui est traité, comment les personnages se comportent… puis nous nous renseignons sur des événements ou des personnages en particulier. Analyser la géographie est aussi fondamentale, puisque nous partons souvent de lieux, comme Memphis dans Assassin’s Creed Origins par exemple, pour construire une trame narrative. Ensuite, nous étudions les livres, des écrits anciens comme ceux d’Hérodote, les magazines d’Histoire, nous fouillons dans les rapports archéologiques et discutons avec des égyptologues (dans le cas d’Assassin’s Creed Origins, NDLR). Pour Origins, nous avons par exemple été en contact avec Jean-Claude Golvin, qui est un architecte, devenu archéologue, puis devenu peintre. Il s’est mis à la peinture, car à son époque, il n’y avait pas les outils nécessaires pour reproduire des bâtiments tels qu’ils étaient il y a des milliers d’années. Ainsi, il a lui-même illustré des plans archéologiques qui n’existaient nulle part ailleurs.»
Joueuse assidue de ce dernier opus d’Assassin’s Creed (et des précédents!), je me retrouve face à une peinture de Jean-Claude Golvin représentant la ville d’Alexandrie. La carte de la ville figurant dans le jeu est d’une fidélité impressionnante, même si les échelles ont dû être remaniées pour convenir au jeu.
Lors de notre discussion, Jean Guesdon prend alors une manette et démarre le Discovery Tour. Dans ses explications, ce n’est plus le directeur créatif qui semble s’exprimer, mais bien un passionné d’histoire, ravi de partager toutes ses connaissances: «Ici nous pouvons voir la grande voie canopique qui traverse la ville, ici le Sérapéum, l’Heptastade qui relie Alexandrie et l’île de Pharos… Ah et tiens, où est le Paneion déjà?» Maxime Durand, historien de métier désigne du doigt son emplacement. «Ah oui, le voilà! Et ici la bibliothèque, qui est dans le Quartier latin.»
Le travail de reproduction est d’autant plus fascinant que la période du jeu, à savoir l’Égypte antique en 49 av. J.-C, est particulièrement mystérieuse et très dense. Mais si cette période de l’histoire demande un travail encore plus conséquent pour les équipes, elle n’a pas été choisie au hasard par Ubisoft qui ne pouvait pas rêver mieux pour son Discovery Tour. «Cette période est dotée d’un bagage culturel et mythologique extraordinaire. Rien que le personnage de Cléopâtre suscite fascination et mystère chez le public. Et puis les pyramides, n’en parlons pas!», plaisante Maxime Durand. «D’ailleurs, en 49 av. J.-C, les pyramides existaient depuis déjà 2500 ans et pourtant on parle toujours d’Égypte antique pour cette même époque. Il y a plus de temps entre les pyramides et Cléopâtre qu’entre Cléopâtre et nous», raconte Jean Guesdon.
Si le Discovery Tour a une vocation éducative, il est aussi libérateur pour les développeurs d’Assassin’s Creed. En effet, les équipes d’Ubisoft disposent pour chaque jeu des connaissances très complètes, mais ne peuvent pas toutes les mettre à profit pour des raisons techniques. De plus, le Discovery Tour permet de casser la barrière du jeu vidéo afin de s’ouvrir à un public beaucoup plus large. «Depuis longtemps, il y avait une frustration des équipes. On fait un super boulot, mais à cause des barrières du jeu, des gens n’y ont pas accès. Dès Assassin’s Creed 2(2009), on créait une petite encyclopédie dans chaque jeu, mais ça n’enlevait pas cette frustration», confie Jean Guesdon. «Le jeu vidéo peut proposer autre chose que de progresser dans un scénario ou gagner des niveaux.»
UN OUTIL FORMIDABLE POUR LES ENSEIGNANTS
Marc-André Ethier, enseignant à l’Université de Montréal et expert en didactique de l’histoire, a lui-même contacté Ubisoft il y a plusieurs années, intéressé par les possibilités que pouvait offrir Assassin’s Creed. «J’ai demandé à Maxime Durand si c’était possible de faire un genre de visite. Je le harcelais presque! Mais bien sûr, à cause du devoir de confidentialité, il ne pouvait rien me dire. Puis, en 2014, Maxime m’informe qu’Ubisoft va faire quelque chose. Et ce n’est que récemment que j’ai pu mener une étude sur l’impact du Discovery Tour dans neuf écoles de Montréal.»
Cette étude est simple: Marc-André Ethier a choisi d’évaluer les connaissances de deux groupes de 20 élèves sur la bibliothèque d’Alexandrie. Ce thème est l’un des 75 tours proposés par le Discovery Tour. Résultat: les élèves arrivent à une moyenne de 22% de réussite. Par la suite, un groupe suit un cours avec un enseignant, tandis que le second suit la visite du Discovery Tour. Pour finir, les élèves sont à nouveau interrogés pour tester l’évolution de leurs connaissances. Pour ceux qui ont suivi le cours avec un professeur, le score de réussite est monté à 54%, alors que les élèves ayant testé le Discovery Tour sont arrivés à 44%.Reproduction de la bibliothèque d’Alexandrie dans le Discovery Tour
«Je ne pensais pas qu’ils apprendraient quelque chose avec le Discovery Tour, avoue Marc-André Ethier. Je ne suis pas naturellement intéressé par le jeu vidéo et je reste toujours prudent sur ce genre de choses. Les gens ont tendance à s’emballer avec la technologie. Mais je dois bien reconnaître que le Discovery Tour est très riche, et contrairement à ce que je pensais, c’est-à-dire que les élèves sont trop stimulés et bombardés d’informations, et bien ils ont en fait appris des choses.»
Le Discovery Tour s’inscrit dans une volonté relativement récente de la part de l’industrie du jeu vidéo de s’intégrer dans l’éducation. En effet, quelques autres jeux vidéo sont déjà utilisés par de nombreux professeurs à travers le monde, comme le célèbre jeu Minecraft, ou encore Civilization V et son dérivé CivilizationEDU. Ubisoft semble vouloir faire passer un niveau de plus à ce concept avec Origins. «Je pense que le Discovery Tour est un support très intéressant pour un enseignant, confie Jean Guesdon. Il trouve tout son sens quand un professeur va venir développer plus en profondeur certains points présents dans le jeu.» Le Discovery Tour séduit déjà à travers le monde puisque plusieurs enseignants ont commencé à s’en servir. «Il y a même des égyptologues à l’Université de Madrid qui vont bientôt l’utiliser», continue Maxime Durand. «Le vrai plus de ce genre de concept, c’est qu’il permet une immersion, notamment pour de jeunes élèves qui apprendront mieux s’ils «sentent» le monde qui les entoure.»
Marc-André Ethier témoigne lui aussi de cet intérêt des enseignants pour le jeu vidéo: «Il y a déjà beaucoup d’enseignants qui s’en servent. Certains bâtissent même des cours là-dessus. C’est devenu un style d’enseignement.»
Une preuve de plus de l’incroyable potentiel du Discovery Tour – et plus généralement du jeu vidéo – dans le système éducatif puisque les enseignants semblent ouverts aux nouveaux outils qui leur sont proposés.
UNE RÉPONSE AUX POLÉMIQUES?
Mais malgré une qualité de travail indéniable, la franchise Assassin’s Creed subit toujours des critiques et même des polémiques liées à la vérité historique. En effet, les quelques détracteurs de la saga, qui oublient souvent qu’il s’agit avant tout d’un jeu vidéo, ont parfois du mal avec quelques libertés prises par les développeurs. On se souvient notamment du mini-scandale qu’avait provoqué en France la sortie d’Assassin’s Creed Unity (qui prend place pendant la Révolution française). Même les politiques y avaient mis leur grain de sel, débattant sur le cas de Robespierre, décrit comme un tyran sanguinaire dans le jeu.
À l’évocation de ces événements, Jean Guesdon et Maxime Durand ne peuvent s’empêcher de sourire et analysent les faits avec beaucoup de recul.«La marque Assassin’s Creed s’est donné le mandat de rendre l’Histoire accessible à tous, de rendre les gens curieux. Aujourd’hui, après dix ans à montrer notre sérieux, nous sommes légitimes pour créer un concept tel que le Discovery Tour.»
À chaque nouveau jeu, des férus d’histoire s’amusent également à lister les quelques erreurs historiques. Mais la plupart ignorent souvent qu’il ne s’agit pas d’erreurs, mais de modifications volontaires de la part des développeurs pour les besoins du jeu. «Dans Origins par exemple, nous avons dû reproduire le théâtre de Cyrène. À l’origine, il est de forme ovale, mais nous l’avons fait rond car cela permettait d’alléger le jeu en termes de place de stockage», explique Jean Guesdon. «Plusieurs changements ont aussi été apportés pour les besoins du gameplay», poursuit Maxime Durand. Manette en main, l’historien nous conduit au temple de Sekhmet. «Dans le jeu, vous pouvez accéder au temple quand vous voulez, tout comme les habitants puisqu’il est toujours ouvert. Pourtant, dans la réalité de l’époque, seuls les prêtres pouvaient y entrer et ils fermaient la porte afin de protéger la divinité. Avouez que cela aurait été dommage d’empêcher les joueurs d’entrer dans le temple!» Autre exemple avec les couloirs des pyramides: normalement très étroits, ils ont été élargis pour laisser passer le personnage du jeu sans difficulté.
Photo d’un véritable sanctuaire d’un temple
Sanctuaire du temple de Sekhmet dans le jeu
Ces décisions prises à l’interne, et donc que les joueurs ignorent, sont désormais expliquées dans le Discovery Tour. En effet, si vous vous rendez au temple de Sekhmet, une indication apparaîtra pour vous expliquer qu’en réalité, il était impossible pour la population d’entrer dans le temple – une information inexistante dans le jeu de base pour ne pas casser l’immersion du joueur. Les utilisateurs du Discovery Tour pourront également découvrir plus en détail le travail des développeurs puisque des petites capsules d’informations sont disséminées dans le jeu.
«Toutes ces décisions ne sont pas prises du fait que nous soyons ignorants. Au contraire, on sait, mais nous devons prendre des décisions et c’est aussi ça que nous voulions montrer», ajoute Jean Guesdon.
CACHEZ CE SEIN QUE JE NE SAURAIS VOIR!
Mais bien que justifiées, des décisions peuvent toujours créer le débat. En effet, dans le Discovery Tour certaines modifications ont été apportées non pas par nécessité technique ou scénaristique, mais «par souci d’inclusion». Le concept vise un public très large et a pour ambition d’être utilisé dans les écoles, ce qui a poussé Ubisoft à censurer (si on peut vraiment parler de censure dans le cadre du jeu vidéo) les parties intimes des statues (contrairement au jeu de base) en les cachant à l’aide de… coquillages! Une décision qui peut paraître surprenante puisque le Discovery Tour a pour ambition d’apprendre l’histoire.
Plein écran
Mais le parti pris d’Ubisoft est compréhensible, même s’il peut paraître extrême. Avec un concept aussi nouveau et compte tenu de l’image que peut avoir le jeu vidéo auprès d’individus peu familiers avec cet univers, les studios ont sûrement voulu assurer le coup afin de toucher le plus de personnes possible. Car, encore une fois, c’est bien cela le premier objectif d’Ubisoft avec le Discovery Tour: rendre l’Histoire accessible à tous. «On a voulu accommoder le plus grand nombre de personnes, que ce soit pour des raisons religieuses ou d’âge. Pour les enseignants, on veut leur assurer que le Discovery Tour est sécuritaire. Et puis, on a voulu être inclusifs, comme ajouter des filles dans les écoles du jeu alors qu’à l’époque, seuls les garçons allaient à l’école. Mais on ne voyait pas ce que cela apportait de ne mettre que des garçons, donc on a juste créé une petite capsule d’information pour expliquer ce choix», raconte Jean Guesdon.
Marc-André Ethier a quant à lui une analyse personnelle sur cette «censure». «C’est une question qui se pose. C’est un gros débat, mais pas seulement pour le Discovery Tour. Déjà plusieurs musées commencent à faire la même chose, ce qui est plus problématique dans leur cas». Marc-André Ethier fait ici référence à la Manchester Art Gallery, en Angleterre, qui a retiré le tableau Hylas et les nymphes de William Waterhouse (1896) le 26 janvier dernier. La toile a été remplacée par un message disant ceci: «Cette galerie présente le corps des femmes soit en tant que «forme passive décorative» soit en tant que «femme fatale». Remettons en cause ce fantasme victorien! Cette galerie existe dans un monde traversé par des questions de genre, de race, de sexualité et de classe qui nous affectent tous. Comment les oeuvres d’art peuvent-elles nous parler d’une façon plus contemporaine et pertinente?»Plein écranHylas et les nymphes, de William Waterhouse (1896)
Une décision vivement critiquée par le public et les critiques d’art, mais qui lance un nouveau débat. Cependant, Marc-André Ethier fait une différence entre le cas de musées comme celui de Manchester et le Discovery Tour. «Je peux comprendre la décision d’Ubisoft, car je les considère d’abord comme des artistes. Ainsi, tout comme un artiste, ils donnent leur propre vision. S’ils décident de ne pas montrer certaines choses, c’est leur choix. Ubisoft a avant tout un intérêt artistique et commercial, l’apport historique est un plus pour eux. Et pourtant, Jean Guesdon a un vrai grand intérêt pour l’Histoire, ce qui est déjà très rare. Ce qui peut me poser plus problème, c’est le cas de certaines écoles religieuses qui censurent elles-mêmes des contenus historiques par exemple.»
Cette vision artistique expliquée par Marc-André Ethier donne un intérêt supplémentaire au Discovery Tour. «Un concept comme celui-ci nous permet aussi de répéter aux élèves que le jeu vidéo n’est pas la réalité, mais aussi de les sensibiliser sur cette dimension artistique. Le jeu vidéo, c’est un humain qui donne son avis, comme un artiste.»
UN FUTUR PLEIN DE PROMESSES
Le Discovery Tour et autres concepts du genre semblent avoir un bel avenir devant eux, notamment avec le système éducatif qui est lui aussi en pleine évolution, se rapprochant un peu plus des outils technologiques. «Le fossé entre le monde de l’enseignement des sciences humaines et le monde du digital se rétrécit énormément», confie Maxime Durand.
«Il va y avoir des suites à cela, car ça fait partie de la vie. Et puis, les enseignants prennent ce qu’il y a à leur disposition, analyse Marc-André Ethier. Ça stimule l’intérêt et c’est désormais trop présent pour qu’on n’en parle pas. Bien sûr, cela reste un outil, un moyen, mais quand vous savez que les enfants passent 25 heures par semaine à l’école et autant de temps devant des écrans, alors le projet est important! Si on peut faire en sorte qu’une partie de leur temps sur les écrans leur permette d’apprendre, alors c’est une bonne chose.»
Jean Guesdon est bien sûr du même avis et imagine un bel avenir pour ce genre de concept: «Le jeu vidéo est partout, même sur les téléphones. Ceux qui grandissent aujourd’hui, ça fait partie de leur vie. Souvent, les professeurs qui sont intéressés par des concepts comme le Discovery Tour, ce sont des jeunes profs dans la trentaine pour qui le jeu vidéo n’a rien de diabolique. Au contraire, ils ont du plaisir avec ça depuis qu’ils sont jeunes, et ça ne les a pas empêchés de faire des études, d’apprendre des choses et d’être profs. Ils se rendent aujourd’hui compte de la puissance du médium. Les enfants d’aujourd’hui seront les développeurs et les enseignants de demain.»
Aujourd’hui, Ubisoft continue de récolter les premiers avis (déjà très positifs!) avant de penser au futur du Discovery Tour. «En tout cas, on est disponibles pour discuter avec les enseignants, ou même le ministère de l’Éducation!», annonce Jean Guesdon.
Ainsi, rien n’est planifié pour le moment, mais Jean Guesdon, qui parle alors au nom de toute l’équipe d’Assassin’s Creed, se dit fier du travail accompli, laissant ainsi l’outil potentiellement fabuleux du Discovery Tour entre les mains des enseignants et des utilisateurs.
Le Discovery Tour est disponible gratuitement sur PC, PS4 et Xbox One pour les détenteurs d’Assassin’s Creed Origins, et disponible à l’achat sur PC.