Une bande dessinée sur la Seconde Guerre mondiale en Belgique et sur le colonialisme en RDC. Des scènes aux couleurs éclatantes, un coup de crayon précis et merveilleusement expressif.
La bande dessinée Les jardins du Congo de Nicolas Pitz traite de la résistance dans le maquis belge pendant la Seconde Guerre mondiale et du colonialisme en RDC, de 1946 à l’indépendance en 1960. Le regard porté sur ces deux événements historiques est réaliste et sans langue de bois.
L’auteur nous présente un personnage central à échelle humaine. Il se nomme Yvon.
Délaissé par son père le traitant de pleutre car il refuse de s’engager dans l’armée et par sa mère partie à Bruxelles, il rentre à 17 ans de plein fouet dans la Seconde Guerre mondiale. Il prend rapidement le maquis et pendant quatre ans tente de survivre ainsi aux côtés d’autres résistants.
Pas franchement héroïque, Yvon est un être de chair et d’os tentant avant tout de sauver sa peau durant la Seconde Guerre mondiale.
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, quasi sans passé et désireux de se construire un futur plus heureux, il décide de s’engager dans une des colonies belges, le Congo. Devenu patron d’une sylviculture, il s’enrichit vite. Il traite avec respect et sans racisme apparent ses employés congolais. Se refusant à avoir une histoire avec sa bonne congolaise aux nombreux attraits, de peur d’être mis au ban de la société des colons, il se décide à chercher une femme en Belgique. Deux ravissants enfants naissent de cette union de convenance. Tout semble lui sourire. Il a la vie dont il n’avait jamais osé rêver.
Dans Les jardins du Congo, Yvon découvre dans la colonie belge une forme de paradis sur terre.
Les événements historiques vont venir perturber ce bonheur inénarrable. Les scènes exotiques et d’un grand onirisme deviennent bientôt des dessins cauchemardesques illustrant la fin d’un monde idéalisé.
Patrice Lumumba, homme politique à l’origine de l’indépendance du Congo, transmet aux congolais le goût de la liberté, du droit à être payé décemment, de l’égalité entre les êtres et le sentiment de fierté nationale depuis longtemps oublié. Ces discours humanistes et égalitaires mènent irrémédiablement à la fin du régime colonial et ainsi à la fin du monde d’Yvon. Retour dans une Belgique grise, maussade et ouvrière.
A travers cette confrontation de plusieurs mondes, réels ou imaginés, Les jardins du Congo de Nicolas Pitz aborde avec distance et intelligence le colonialisme. C’est un nouveau regard dans lequel le discours convenu n’est pas de mise.
Interview de Nicolas Pitz, auteur de la BD Les jardins du Congo
Chez Nicolas Pitz toutes les couleurs sont chaudes et prétexte à peindre les émotions !
Sans cliché et plein d’humanité, Nicolas dépeint sous les traits d’Yvon, la vie d’une personne qu’il a bien connue, son grand-père.
Lorsqu’Yvon se cache dans la forêt pendant la Seconde Guerre mondiale, sa peur est représentée par un faune impressionnant, mi-cerf mi-humain, baigné dans une couleur rouge ou verte.
Lorsqu’il croit découvrir le paradis sur terre, l’euphorie qui le submerge est illustrée par des scènes de nature luxuriante aux couleurs bigarrées jaunes orangées.
Son retour en Belgique est vu à travers un filtre gris bleuté ou violet outrancier : Yvon a été contraint de quitter le Congo. Ces couleurs illustrent la tristesse et le sentiment de perte qui l’assaillent.
L’auteur évoque ainsi, à travers une palette variée et chatoyante de couleurs, un vécu personnel autant qu’une trame historique. Les nombreuses émotions du personnage d’Yvon sont autant d’allégories visuelles sur la palette infinie dont dispose Nicolas Pitz.
Par Eva Dréano - Source de l'article Africavivre
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